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Maîtres des budgets, les socialistes doivent s’en servir contre la classe cléricale et nobiliaire en faveur des pauvres et des opprimés, établir des logemens ouvriers, des systèmes d’assurance, nourrir et habiller les enfans des écoles.

Les idées de M. Brousse et de M. Adrien Veber s’imposaient ainsi, par la force des choses, à leurs adversaires d’autrefois. M. Millerand leur donnait la consécration suprême, lors du banquet des Municipalités de Saint-Mandé, au lendemain même des élections municipales de mai 1896, et qui est devenu la charte du parti socialiste unifié depuis le Congrès de Paris (1899) : conquête des pouvoirs publics par le prolétariat organisé en parti de classe, entente internationale des travailleurs, socialisation des entreprises privées déjà constituées en monopoles, aux mains des particuliers, ou des compagnies capitalistes telles que mines, chemins de fer, établissemens de crédit, usines métallurgiques, à mesure de leur arrivée à maturité sociale. M. Millerand ne prononçait pas le mot de « Révolution. »

Une fois que la porte des municipalités leur a été ouverte par le suffrage universel, les conseillers socialistes ont tenté de se fédérer, afin de fortifier leur action. Ils ont violé ou tourné la loi de 1881, qui interdit en termes formels tout groupement des administrations communales. La rivalité des sectes socialistes a formé, jusqu’à présent, le principal obstacle à l’unité du mouvement. En 1899 s’est tenu le septième congrès des socialistes municipaux. Les articles principaux de leur programme ont trait à la journée de huit heures et au minimum de salaire pour les travaux communaux, à la suppression des taxes d’octroi et à leur remplacement par des taxes somptuaires et des centimes additionnels, aussi longtemps qu’on ne pourra appliquer l’impôt progressif sur le revenu ; au referendum sur toutes les questions financières, bien qu’il ne soit pas admis par la loi française ; aux unions départementales des municipalités socialistes ; à l’action d’ensemble substituée aux manifestations isolées ; à l’autonomie communale, à la régie des travaux et à l’organisation des services publics.

Comment les municipalités entre les mains des socialistes ont-elles accompli ce programme ? Des enquêtes ont été faites par M. Roseyro en 1806, par M-Ripault en 1900, dans le Journal des Débats, la plus complète qui ait été publiée, par un rédacteur anonyme du Temps, sur les municipalités collectivistes du Nord.