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pour longtemps encore une nécessité pour le travail agricole sous les tropiques et pour le ménage des nègres.

Si nous cherchons maintenant des remèdes à l'esclavage, il faut le considérer séparément, sous les différens aspects qu'il prend : captifs de guerre ou fugitifs, travailleurs immigrans ou captifs de guerre. La guerre entre tribus ou les razzias opérées par les chefs conquérans, ont été de longue date la cause première de la réduction'en captivité de populations entières. Aussi, les défaites infligées à des chefs comme Ahmadou, Behanzin ou Samory, la conquête du Touat et du Tidi-Kelt par nos troupes sont autant de victoires sur la traite, parce qu'elles tarissent la source de ce commerce odieux en pacifiant ces contrées. Le jour où Français et Belges, Anglais et Allemands auront pris possession du Hinterland qui est assigné à chaque pays par les traités, et seront maîtres du centre de l'Afrique, la traite aura vécu.

D'ici là, il faut appliquer rigoureusement les mesures préconisées à Bruxelles, à savoir : établir des stations mrilitaires fortement occupées, dans les Hinterland, pour prévenir ou punir la chasse à l'homme, construire des routes et des voies ferrées, accompagnées de lignes télégraphiques et organiser la navigation à vapeur sur les fleuves afin de remplacer le plus vite possible le portage des marchandises à dos d'hommes, en général d'esclaves, et de procurer aux indigènes le numéraire, qui leur permettrait de se passer de « monnaie humaine » pour acheter des chevaux, du sel ou des vêtemens de luxe. Quant au commerce des armes à feu et des munitions, il faut, suivant les prescriptions de la conférence de Bruxelles, restreindre leur livraison à certains postes et pour un usage déterminé. L'alcool, ce poison, bien plus funeste encore à la race noire qu'à la blanche, devrait être absolument interdit, car il ne produit pas seulement l'extinction de la race, mais il excite encore les passions cruelles et sauvages.

Quand la traite se présente, comme on l'a vu pour les Annamites et comme cela avait lieu naguère encore pour les Hindous aux Antilles, sous la forme hypocrite de contrat de louage de travailleurs, sans garantie pour l'ouvrier transporté loin de son pays, il faut démasquer les opérations véreuses de certaines maisons de commerce et donner à ces contrats une garantie, en les faisant passer devant les consuls ou des notaires, de manière à protéger l'indigène contre la rapacité des agences de recrutement. Il faudrait, en outre, comme l'ont fait les Anglais aux