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la couche de cendres fut à l’état normal, si je puis ainsi dire, l’espoir de trouver quelque objet précieux ne devait pas être abandonné ; mais bientôt, à côté de la couche de cendres qui devenait de plus en plus épaisse, on rencontra une autre couche de débris montrant aux yeux les moins clairvoyans que les spoliateurs avaient passé les cendres au crible, jeté à gauche, comme ils le font encore, les débris de toutes sortes restant dans le crible, après que la cendre pure était tombée sous le van. Dès lors, tout espoir dut être abandonné, et de fait je n’ai presque rien rencontré dans un tombeau qui devait être si riche, car, s’il n’eût pas renfermé des objets réellement précieux, notamment en or et en argent, on ne se fût pas donné la peine de passer au crible les restes échappés à l’incendie. Il semblera sans doute que les profanateurs raisonnaient assez mal, qu’il eût été préférable de s’éviter le second travail en ne mettant pas le feu et de prendre intacts les objets renfermés dans la tombe ; mais je ferai observer que la destruction fut avant tout une affaire de religion, que le fanatisme religieux y joua le plus grand rôle, qu’on mit d’abord le feu qui purifie tout et qu’ensuite on rechercha les métaux précieux : de la sorte furent conciliés les droits de la religion et les intérêts des spoliateurs.

Je savais, pour avoir publié la vie de Moyse d’Abydos, qu’il en avait été ainsi : je ne devais donc pas être étonné de trouver les preuves du fait. Ces preuves, je les ai rencontrées sur une très grande quantité de tessons de poterie, où non seulement les cénobites de Moyse, en leurs momens de loisir, s’amusèrent à dessiner au charbon des images naïves d’oiseaux qui n’ont jamais existé que dans leur imagination, des croix grecques et une tête de Christ, mais encore écrivirent des mots qui ne peuvent être que chrétiens, comme ce mot omoousios. qui a tant causé de discussions entre Ariens et Orthodoxes avant de faire couler tant de sang, et ils laissèrent même leurs noms sur un fragment de poterie : Schenoudi, Boqtor (Victor) Démétrios, etc., de sorte qu’il est indubitable qu’ils se glorifiaient de leur action. Cette observation, jointe à celles que j’avais faites précédemment, ne fit que me confirmer de plus en plus dans la pensée que j’allais trouver le tombeau d’Osiris, car, si l’on ne doit pas se fier plus qu’il ne convient au raisonnement déductif et inductif quand il s’agit de découvertes archéologiques, il ne faut cependant pas le bannir absolument des élémens qui mènent aux grandes trouvailles. Dans l’espèce,