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les délits commis, mais ne réussissent pas à en prévenir le retour : après avoir rasé quelques centres d’habitation, fusillé quelques coupables, elles rentrent à Tananarive sans seulement avoir pu joindre les bandes hostiles. L’autorité civile a une vision plus juste des nécessités de la situation : elle croit qu’avec un réseau serré de petits postes, où seraient placés des miliciens indigènes avec des cadres français, on parviendrait à prévenir, on n’aurait plus à réprimer, parce qu’on empêcherait la formation des bandes, ou qu’en faisant le vide autour d’elles, on les affamerait. Mais, pour constituer solidement de pareilles milices, il faut des sous-officiers ; l’armée ne peut en prêter qu’un nombre dérisoire, une quinzaine, sous peine d’affaiblir outre mesure les troupes régulières ; on devra donc attendre, — et l’on attendit, en effet, plusieurs semaines, — qu’on en envoie de France, avec l’autorisation de disposer d’armes inutilisées par les corps réguliers, et qui sont emmagasinées à Tananarive et à Majunga.

On était donc loin, au printemps de 1896, des espérances conçues à l’automne de l’année précédente. Certes, il n’y avait rien là d’irrémédiable et l’expérience a prouvé que le remède était relativement aisé à découvrir et à appliquer. Mais enfin, après sept mois écoulés depuis l’entrée des troupes françaises à Tananarive, l’œuvre primordiale de la pacification paraissait compromise. Au point de vue international, l’on était tout aussi peu avancé : la formule de la « prise de possession » n’avait pas mieux mis fin aux difficultés diplomatiques, que celle qui fondait le gouvernement de la reine « sur la volonté de la République » n’avait empêché ou arrêté le développement de la rébellion. Pour triompher des premières et terminer, au regard des tiers, la question toujours pendante des juridictions consulaires et du régime douanier, il convenait de prendre une position à la fois plus connue et plus définie. Pour vaincre la seconde, il fallait trouver une méthode et un homme. C’est à quoi s’appliqua le cabinet Méline dès sa constitution (29 avril 1896).


III

« En vue de lever certaines difficultés diplomatiques, le gouvernement juge nécessaire de proposer au Parlement de déclarer Madagascar colonie française. Cette décision ne modifie pas le statut personnel des indigènes et ne change pas l’organisation