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clergé n’eut rien de plus national que l’ancien et, à l’indifférence qu’il témoignait aux populations, on le vit joindre du premier jour le spectacle des pires scandales.

Peut-être les eût-on supportés, si la persécution religieuse n’était venue tout brouiller : un courageux Gallois, John Penry, fut condamné à mort et pendu haut et court, en 1593, pour avoir donné une voix aux protestations silencieuses de la conscience populaire. Cette exécution maladroite précipita le dénouement de la crise. Le martyre est contagieux ; on le vit une fois de plus avec Rees Pritchard, Howell Harris, William Steward, Daniel Rowlands, Howell Davies, Whitefield, etc. Leurs prêches, faute d’églises, se tenaient en plein air, aux champs, sur les grèves, dans les solitudes brumeuses du Snowdon. S’ils trouvèrent un écho dans le peuple, on en peut juger cependant par les chiffres : sur 1 776 000 habilans que compte à cette heure la principauté de Galles, 225 000 seulement pratiquent la religion anglicane. Tout le reste, sauf 50 000 catholiques, appartient aux sectes non conformistes (wesleyens, presbytériens, baptistes, indépendans, etc.). Il n’est pas exagéré de dire que la substitution du méthodisme non conformiste à l’anglicanisme officiel fut le salut pour la nationalité galloise. Sans autre ressource que les dons volontaires qu’il recueillait dans le peuple, tout un clergé 86 constitua, sorti des entrailles de ce peuple, et dont l’austérité, l’application au devoir et la belle flamme zélatrice faisaient le plus heureux contraste avec l’indifférence et les mœurs relâchées de l’église anglicane. L’érection du premier temple non conformiste remonte au mois de novembre 1639. Il y a aujourd’hui, en Galles, près de 3 000 de ces temples, contre un millier de temples anglicans. L’anglicanisme n’en est pas moins demeuré la religion officielle de la principauté, et cela ne tirerait point à conséquence, sans doute, si les Gallois, qui paient déjà 300 000 livres sterling par an pour l’entretion de leurs cultes nationaux, n’étaient pas frappés encore de dîmes exorbitantes pour l’entretien d’un culte qui leur est à peu près étranger. Le seul personnel anglican des quatre diocèses de Bangor, de Saint-Asaph, de Llandalf et de Saint-David prélève chaque année, dans la principauté, la somme énorme de 6 404 450 francs. Que la principauté supporte malaisément une injustice si criante, la chose s’entend assez. Aussi bien l’agitation contre les dimes (anti-tithe-war) ne date-t-elle pas d’aujourd’hui ; mais c’est à partir de 1886 qu’elle a pris sa