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pour MM. Taine et Zola : « Car, dit-il, au point de vue purement technique, la poésie de Whitman demeure un mélange confus de prose et de rythme libre. » Or, on sait déjà que la découverte de Holz est le rythme « nécessaire. » Néanmoins, peut-il ignorer, lui, le familier de notre littérature, que nous possédons, depuis une quinzaine d’années déjà, une école de jeunes poètes, qui, en d’innombrables revues, appliquent précisément les principes dont il se réclame : suppression de la rime et de la mesure, recherche du rythme approprié au sujet ? Était-il besoin, pour formuler ces principes, de remonter jusqu’au poète étrange de Long-Island ? Nul n’aurait-il donc lu, au delà du Rhin, la Chevauchée d’Yeldis de M. Viélé-Griffin, ou le Pèlerin passionné de M. Moréas ?

On les a beaucoup lus, au contraire, et imités dès longtemps, si nous en croyons les doléances de ceux qui voudraient, pour la jeune littérature allemande, plus d’indépendance et de patriotisme. « Les morts vont vite, écrivait, dès 1892, un correspondant de la Gazette de Cologne, surtout s’il leur faut suivre nos jeunes littérateurs. Les imitateurs allemands de Zola, ses élèves les plus fidèles, les pédans du naturalisme, les techniciens suivant la formule de Holz et Schlaf ne veulent plus aujourd’hui entendre parler de Zola, après lui avoir pris théorie et pratique. Le nouvel étendard qu’ils déroulent solennellement est celui du symbolisme… »

Et M. Bartels ajoute, en 1899 : « Après le court triomphe du naturalisme, l’esprit se vengea ; on ne voulut plus entendre parler du corps, et l’on se plongea jusqu’au fond dans l’abîme du mysticisme… et de l’absurdité. Les Français avaient donné l’exemple : les Allemands s’empressèrent naturellement de suivre… Pourtant, depuis le symbolisme, on n’a pas reçu de nouveau mot d’ordre de Paris. La France semble, cette fois, avoir manqué au devoir de nous en fournir un tous les trois ans[1]… »

C’est en songeant à ces derniers épisodes littéraires que Holz considère sa nouvelle théorie, celle du rythme nécessaire, comme un aboutissement et non plus comme une initiation, ainsi que le furent jadis les doctrines d’où naquit Papa Hamlet. Le symbolisme à la française triomphe en effet au delà du Rhin depuis quelques années déjà, avec MM. Dehmel, Bierbaum, Falke, Ernst, Stolzenberg : triomphe discuté d’ailleurs, car M. Mehring compare

  1. Deutsche Dichtung der Gegenwart ; Leipzig, 1899.