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Holz admire, qu’il cite plus d’une fois dans l’Art, et dont il aurait dû méditer les enseignemens.

F. Engels, le collaborateur de Marx, a écrit en 1846 dans le Deutsches Burgerbuch, à propos d’un ouvrage de Fourier : « Les Allemands commencent à gâter jusqu’au mouvement socialiste. En cela comme en toutes choses, venus les derniers et demeurés les plus inactifs, ils croient pouvoir faire oublier leur somnolence par le mépris qu’ils affichent vis-à-vis de leurs prédécesseurs et par leurs vantardises philosophiques. A peine le socialisme existe-t-il en Allemagne, qu’il est accaparé par une armée d’esprits spéculatifs, qui pensent faire merveille pour traduire dans le jargon de la philosophie hégélienne quelques phrases devenues depuis longtemps des lieux communs en France et en Angleterre. Ils lancent dans le monde cette nouvelle sagesse comme quelque chose d’inouï, comme la véritable théorie allemande, afin de pouvoir jeter ensuite de la boue à cœur joie sur la pratique défectueuse, sur les risibles systèmes sociaux des stupides Français... Cette théorie allemande, cette pimbêche de la pire espèce, a aussitôt éclairé sans peine le socialisme français dans tous ses points obscurs, lui a assigné un rang inférieur, l’a dépassé, et l’a porté à ce degré suprême de développement qui est la théorie allemande, la digne personne que rien n’embarrasse jamais. Naturellement, il ne lui vient pas à l’esprit de se familiariser d’abord un peu avec son sujet... »

Cet avertissement, sorti il y a un demi-siècle d’une plume allemande, pourrait être la réponse de Taine, et de son imitateur Zola, à leur jeune contradicteur. Écrivons naturalisme au lieu de socialisme, en cette spirituelle diatribe, et, malgré son exagération évidente aux yeux de tout juge équitable de la pensée allemande, elle pourra servir aujourd’hui encore de remontrance salutaire à certains écarts juvéniles. Si, en effet, l’on ne connaissait de Holz que ses dissertations théoriques, ne serait-on pas tenté de souscrire au jugement que M. Bartels attribue, sur son compte, aux leaders de la littérature allemande ? « Ils le considèrent un peu, dit-il, comme un personnage comique. »

Et pourtant, de ces conclusions théoriques, si bizarrement déduites, naquit le premier succès de Gerhart Hauptmann. Car ce fut aussitôt après son voyage à Paris, et au sortir de la crise intellectuelle racontée par lui dans l’Art, que, soulagé sans doute par les effusions théoriques de sa lettre-préface, Holz se sentit de