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La loi de l’alternance du repos et du travail reçoit, dans le cas du muscle, une explication très satisfaisante, qui, d’ailleurs, s’applique, plus ou moins exactement, à tous les autres organes. La contraction entraîne une dépense d’énergie, qui est fournie par les réserves de glycogène accumulées dans le tissu musculaire. L’énergie mécanique et la chaleur sont des transformations de l’énergie chimique entreposée dans ces matières. La secousse détruit rapidement et même explosivement ces réserves lentes à se reconstituer. A mesure que la provision s’épuise, l’énergie disponible diminue et l’activité devient de plus en plus difficile. La restauration s’opère dans la période du repos, comme la destruction pendant le travail.

On conçoit donc que la nécessité de la période réparatrice sera d’autant moindre que la dépense énergétique de la période de travail aura, elle-même, été plus faible. C’est là précisément la condition du nerf. Nous avons eu déjà l’occasion de dire, à propos de son rôle excitateur, qu’il ne cédait aucune énergie aux organes qu’il provoque à l’action. Il ne dépense rien pour les autres, et à peu près rien pour lui-même, ou du moins peu de chose. Il devient donc vraisemblable a priori, qu’un tel organe, de petite dépense énergétique, ne se fatiguera que difficilement, qu’il pourra agir longtemps sans faiblir et fournir un travail soutenu. Mais, d’autre part, cette supposition est contraire à une sorte de préjugé irréfléchi et anthropomorphique, tiré d’une assimilation vague et inconsciente d’un organe aussi délicat que le nerf à un être frêle et maladif, préjugé qui fait supposer que le nerf est incapable de longs efforts.

Il appartenait donc à l’expérience de décider, et c’est en effet à l’expérimentation que s’est adressé Bernstein, en 1874. Il a soumis un nerf moteur, pendant plus d’un quart d’heure, à l’action d’une série de décharges d’induction, dont chacune était capable de le provoquer à l’activité.

Pour savoir si, au bout de ce temps, le nerf avait encore conservé son aptitude à entrer en activité, et si les dernières excitations étaient aussi efficaces que les premières, il suffisait de voir si, à la fin, elles étaient capables de provoquer le muscle à l’action. Seulement il avait fallu, pendant toute la durée de l’expérience, soustraire ce muscle à l’excitation, faute de quoi, il serait devenu lui-même incapable de réagir, et, par conséquent, de renseigner sur l’état du nerf. Il faut pour cela employer un artifice