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Les théories de l’émission, sous quelque forme qu’elles se soient présentées, qu’il s’agisse du transport des esprits animaux de Descartes, de l’aura de Haller ou du fluide électrique de Galvani, ont nettement montré leur impuissance. On reste donc en présence des seules théories ondulatoires.

Celles-ci ont revêtu deux aspects : celui d’un transport d’action mécanique vibratoire et celui d’un transport d’action chimique. Dans le premier cas, on imagine que chaque particule exécute un léger mouvement vers la voisine et la choque, si bien que la poussée se transmet en définitive à toute la série comme il arrive avec les capucins de cartes dont les enfans se font un jeu : seulement, la particule revient à sa place aussitôt après avoir agi. Comme son déplacement est de l’ordre de petitesse de ses dimensions mêmes, qui peuvent être aussi minimes qu’on voudra l’imaginer, il en résulte que ces excursions infimes resteront inappréciables, et qu’en dernière analyse le mouvement se sera communiqué à travers un conducteur où rien n’aura paru bouger. Ce mouvement qui se déplace c’est l’onde nerveuse, et, cette manière de concevoir l’agent nerveux est celle qui rencontre aujourd’hui, chez les physiologistes, le plus de crédit.

L’onde chimique cependant a commencé, depuis quelques années, à lui disputer la faveur. Quelques-uns supposent que le mouvement qui se propage, dans des conditions d’ailleurs analogues aux précédentes, est une action chimique. Représentons-nous une traînée de poudre que l’on enflamme à l’une de ses extrémités et nous aurons une image du phénomène. La seule difficulté vient de ce que l’action chimique dont le nerf est le théâtre est, certainement, très faible et qu’elle se propagerait cependant avec une assez grande vitesse ; encore n’est-ce pas là, à proprement parler, une véritable objection. D’autre part, cette doctrine a pour elle, qu’en définitive la stimulation nerveuse au moment où elle arrive à destination, c’est-à-dire à l’organe fonctionnel, au muscle, exerce l’office d’un agent chimique, d’un agent d’amorçage dans une réaction chimique, rôle qu’il assumera d’autant mieux s’il possède déjà préalablement cette forme.

En continuant d’employer le terme d’agent nerveux, d’influx nerveux, on ne préjuge rien sur la nature du transport et l’on s’abstient de décider entre ces théories. Il n’y a d’ailleurs pas plus de nécessité que de possibilité de le faire ; et les physiologistes