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IV

Robert le Sage meurt en 1343. A peine son mausolée est-il achevé que la décomposition de la puissance angevine se précipite. Le long et funeste règne de Jeanne Ire finit par un dernier meurtre, et, avant la fin du siècle, les Angevins de Hongrie ont remplacé dans Castel-Nuovo, déjà ruiné et croulant, les Angevins de France. Dans les rares œuvres d’art que produisit cette époque troublée, où la guerre dévorait toutes les ressources du trésor, saint Louis de Toulouse se montre encore parfois dans les églises de Naples. La voûte de l’Incoronata fut couverte, sous Jeanne Ire, de fresques qui rappellent encore le style toscan et les sujets officiels du temps de Robert. On y voit, à côté du cortège nuptial de Jeanne et de Louis de Tarente, des scènes qui évoquent la grande œuvre religieuse et politique de la dynastie à son apogée : La consécration de saint Louis comme évêque, et, à côté, le pape, derrière lequel se dresse la figure colossale de Jésus-Christ, debout entre saint Pierre et saint Paul, et escorté des deux champions de l’Église, Robert et Charles, duc de Calabre, la couronne au front, l’étendard fleurdelysé au poing. Même quand on se perd dans la nuit terrible des dernières années de Jeanne Ire, on peut reposer son regard sur un petit tableau clair et frais qui fut peint en 1371 par un certain Nicola di Tommaso de Florence, demeuré l’un des derniers dans la ville qu’avaient fuie les banquiers et les marchands toscans. C’est un triptyque dont le panneau central représente saint Antoine abbé entouré d’anges ; sur l’un des volets, on voit un saint Louis de Toulouse en chape rose, jeune et charmant. Le culte officiel de saint Louis, roi de France, se perpétue sous les princes de la maison de Durazzo, et, au commencement du XVe siècle, le roi Ladislas envoie des ordres aux grandes villes du royaume pour la célébration de sa fête. Après l’établissement d’une dynastie aragonaise dans la capitale des rois angevins, les deux saints Louis ne cessent pas d’inspirer la peinture populaire des provinces et la peinture d’imitation flamande que la cour de Naples mettait à la mode. On trouve le roi et l’évêque peints sur le tuf, dans les cryptes de la Cava. On rencontre aussi le roi saint Louis, avec saint Charlemagne (S. Loisius rex, S. Karolus Magnus), tous deux magnifiquement vêtus de manteaux bleus couverts de fleurs de lys d’or, sur un triptyque