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observatoire pour faire lui-même des observations sur le cours des astres et il en tenait un journal quotidien. Aux approches des éclipses, tous ses serviteurs, tous ses amis du voisinage étaient sur pied, munis d’instructions détaillées pour étudier avec toute la précision désirable les phases successives du phénomène. Il aurait voulu aussi qu’on notât dans chaque région les courans des vents régnans et qu’on établît de distance en distance des postes pour en déterminer la force et la vitesse. La formation des diverses roches, leur composition, celle des stalactites qu’on trouvait dans les grottes du voisinage, la présence dans plusieurs de ces grottes de crânes et d’ossemens humains et leurs dimensions relatives attiraient tour à tour son attention. Il soupçonnait l’importance de l’étude des fossiles et s’étonnait que tant de siècles se fussent écoulés sans qu’on songeât à s’occuper de ces restes du passé. Les études sur la constitution du corps humain ne lui étaient pas non plus étrangères. Sans doute, il avait conservé encore bien des préjugés de son temps. C’est ainsi qu’il ne rejette pas d’emblée la nouvelle qu’on lui a donnée comme positive « d’un prunelier greffe sur l’estomac d’un Espagnol, » et qui y aurait pris racine. Sans ajouter une foi entière à une pareille fable, il trouve que cette chose, « certainement bien merveilleuse, mériterait d’être approfondie, » et il en voudrait avoir « une information solennellement authentique. » De même, quand son frère Valavès est sur le point de partir pour l’Angleterre, il le prie de ne pas quitter Londres « sans s’informer soigneusement de cette nouvelle maladie, ou charme, par le moyen de laquelle les femmes enceintes ne souffrent aucune douleur et les hommes, leurs maris, endurent les maux de cœur durant toute leur grossesse. On me montra, ajoute-t-il, un médecin qui en était atteint en sa propre personne. Il est bon de s’en éclaircir, si cela a continué ou non. » Au moment où il écrit ainsi (1608), Peiresc, il est vrai, est encore jeune, et il commence à se méfier. La chose lui paraissant anormale, il réclame des renseignemens plus formels. Il a plus tard des exigences plus sévères, et il voudrait que les expériences fussent entourées de toutes les précautions possibles ; « il s’assure qu’on y rencontrerait des merveilles, si on les suivait à la piste les unes des autres. » Avec Gassendi, « il fait des observations très approfondies » sur le cadavre d’un condamné à mort, dont la Cour d’Aix a donné le corps aux professeurs de médecine « une heure et demie après qu’il avait été pendu et étranglé. »