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moindres incidens qui pouvaient survenir dans sa famille, grâce aux lettres que son ami lui adressait avec une ponctuelle régularité.

A côté des satisfactions élevées que Peiresc trouvait dans un pareil commerce, il goûtait aussi le plaisir de se livrer à sa passion de collectionneur dans une contrée où abondaient les souvenirs et les monumens du passé. La capitale de la Provence comptait déjà à cette époque des amateurs et des curieux réputés, parmi lesquels on citait en première ligne Antoine de Bagarris, sieur de Rascas, possesseur d’un grand nombre d’objets d’art, de statues dont « cinquante colosses, » de bas-reliefs, de vases antiques et de médailles, et qui, dès la fin de 1602, était appelé à la garde du Cabinet du roi. Un autre amateur, le conseiller François du Perrier, — celui-là même que Malherbe devait rendre célèbre par l’ode qu’il lui adressait à la suite de la mort de sa fille, — avait hérité de son grand-père, Gaspard du Perrier, d’une collection de médailles qu’en 4608 les États de Provence achetaient au prix de 5 000 écus pour en faire présent à Henri IV. Enfin un notaire royal, Boniface Borilli, descendant d’une longue lignée de tabellions, — son étude était depuis plus de deux cents ans dans sa famille, — commençait également à former une collection que Louis XIII, à son passage à Aix en 1622, honorait d’une visite, au cours de laquelle il offrait en cadeau son propre baudrier au brave tabellion, à qui une si haute faveur tournait complètement la tête.

Les relations nouées entre du Vair et Peiresc étaient bientôt devenues si cordiales que le président, ayant été appelé à la cour en 4605, n’avait pu se séparer de son jeune ami et l’avait décidé, ainsi que Malherbe, à l’accompagner à Paris où il l’introduisit dans la compagnie des hommes éminens qu’il y connaissait lui-même. On peut penser qu’avide de s’instruire comme il l’était, le jeune homme se trouvait là dans son élément. Mais l’occasion de voir encore du nouveau et d’étendre le cercle de ses relations se présentait pour lui dès l’année suivante. C’est probablement, d’ailleurs, d’après les conseils et muni des recommandations de du Vair, — qui lui-même avait été autrefois envoyé en mission en Angleterre, — que Peiresc acceptait d’être attaché à l’ambassade d’Antoine de la Baroderie à Londres. Il y était accueilli par les savans et les érudits le plus en vue, tels que Camden, Robert Cotton et Barclay. Le petit séjour qu’il fit ensuite en Hollande, à