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purement éthiopien, avec les élémens d’une flotte de guerre ; on annonçait d’Angleterre le prochain départ d’une mission abondamment pourvue de cadeaux et d’argent, auprès de l’empereur ; quant à l’Italie, tandis qu’elle s’acharnait, même après les négociations de paix commencées, à protester contre tout trafic d’armes et de munitions de guerre par Djibouti, elle faisait ou laissait répandre le bruit à Entotto que l’arrêt total ou la restriction partielle de ce trafic était la meilleure preuve de la nonchalance de la France et de son dédain pour les intérêts de l’Ethiopie. Ces intrigues complexes n’étaient point sans effet à la cour du négus : aucun agent qualifié ne se trouvant auprès de lui pour commenter et interpréter les changemens de forme à introduire dans quelques dispositions de son projet de traité, il sembla, dans sa réponse du 27 août à la lettre du Président de la République, réclamer la détermina-lion d’une ligne de frontières incompatible avec nos intérêts, ou même, sous prétexte d’une expression plus « littéraire » à donner à la convention, ouvrir la porte à des modifications de fond. Mais, dans cette même réponse, parvenue à Paris à la fin d’octobre, Ménélik désignait le ras Makonneh, gouverneur de Harrar, pour négocier avec le représentant de la France les protocoles annexes de la convention principale. Par-là, il nous fournissait les moyens, soit de consolider, soit de perfectionner celle-ci. M. Lagarde quitta la France au milieu de décembre, avec les instructions de son gouvernement. « Ces pourparlers, lui disait-on après avoir énuméré les questions en suspens et indiqué les solutions à obtenir, ces pourparlers ayant pour but de préciser la portée de certaines clauses de la convention elle-même, il vous appartiendra d’en constater les résultats dans les conditions qui vous paraîtront le plus propres à prévenir tout malentendu ultérieur… Vous ne perdrez pas de vue l’intérêt que nous avons à consolider les liens d’amitié qui nous unissent au négus et vous ne négligerez rien pour développer notre influence en Abyssinie. » Et ailleurs, dans une note plus confidentielle : « J’ai mis à votre disposition, sur le solde du crédit des missions, une somme importante destinée à favoriser l’expansion de notre influence pacifique dans l’empire. Dans ma pensée, ces fonds doivent être principalement affectés à l’exploration des régions du Sobat et de la rive droite du Nil, et à l’établissement de relations amicales avec les populations qui les habitent. Je n’ai pas besoin d’insister sur le haut intérêt politique qui s’attache à la réussite de ces projets et sur le secours