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perfectionne assez pour les rendre comparables au Nautilus, n’auront point à craindre des rencontres aussi macabres et, par surcroît, aussi dangereuses.

Quand un bâtiment sombre en pleine mer, s’il est suffisamment lourd, il fait, comme le disent énergiquement les marins, son trou dans l’eau. Son poids que rien, qu’aucun soutien comparable à la ligne de sonde, ne vient équilibrer, l’entraîne verticalement. Il descend, et, quelle que soit la profondeur de la mer, en peu d’instans, quelques minutes à peine, il vient se reposer sur le fond où il demeure à jamais englouti. Que d’épaves, épaves de gloire ou d’infortune, doivent ainsi joncher les océans, s’ajoutant les unes aux autres, depuis que les hommes naviguent, dans le grand silence, la grande immobilité et la grande obscurité du fond des mers, sur la vase fine qui les recouvre et les ensevelit doucement pendant la lenteur des siècles !

Si le bâtiment est en bois et chargé de matériaux susceptibles de flotter, lorsque la tempête l’a désemparé, quand les vagues ont défoncé ses flancs, y ont pratiqué des brèches par où pénètrent des torrens d’eau, balayant les hommes et les forçant à se réfugier dans les embarcations, comme à cause de ses ferrures, de la sortie de l’air qu’il contenait à son intérieur, sa densité est très peu moindre que celle de l’eau, la coque et son chargement s’enfoncent presque au niveau de la mer que dépassent seuls les tronçons des mâts brisés. Ou bien encore, il se retourne, la quille en l’air. Abandonné par son équipage, dérivant sous la poussée des courans, il décrit des sinuosités, des boucles successives et devient une épave dangereuse pour les navires qui, la nuit, risquent de la heurter et de s’y briser. Il reste ainsi jusqu’au moment parfois lointain où, démoli pièce à pièce par les flots, ses diverses portions disjointes, séparées, émiettées, tombent enfin sur le fond, si elles sont lourdes, ou sont dispersées sur la surface entière de l’océan, jouets des vents et des vagues.


II

La théorie indique deux améliorations indispensables à la méthode ordinaire de sondages à grande profondeur : diminuer le frottement de la ligne et augmenter le poids du plomb. On s’efforça de résoudre ce double problème. Il y en avait en réalité encore deux autres : augmenter la force de résistance de la ligne et,