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est à elle seule plus importante que toutes les îles réunies de cette partie de la côte. Elle a été sans doute rattachée autrefois au continent, mais à une époque fort éloignée, et elle constituait déjà une île très avancée au large lorsque la presqu’île de Quiberon était encore soudée à la pointe du Croisic, par une ligne continue de rochers et de falaises dont il ne reste plus aujourd’hui que des ruines et des fragmens séparés. Cela nous reporte beaucoup plus loin que toutes les époques historiques, et nous ne pouvons avoir à ce sujet aucune indication bien précise.

Belle-Isle est un énorme plateau de roche schisteuse dont les assises grisâtres sont tout à fait parallèles à celles de la côte voisine du Morbihan. Elle a de 15 à 20 kilomètres de longueur, de 4 à 10 de largeur, soit une superficie de près de 10 000 hectares. Son altitude moyenne est de 40 mètres. Elle compte près de 130 villages ou hameaux. C’est le territoire le plus peuplé de la Bretagne dont la population est déjà supérieure en densité à la moyenne de celle de la France, et il paraît l’avoir été de tout temps. On y a retrouvé de nombreux monumens mégalithiques, des tumuli, des dolmens, des menhirs, des ruines de vieux forts de tous les âges, des débris de retranchemens gallo-romains. L’île est divisée en plusieurs petits vallons ombragés, séparés par des plateaux très cultivés. La douceur du climat y permet toutes les récoltes ; on y entretient de bons pâturages ; on y élève d’excellens petits chevaux. Mais elle doit surtout son importance à l’abondance et à la variété de la pêche côtière. Toutes les espèces de poissons et de crustacés, et au premier rang la sardine, y foisonnent ; et les merveilleuses découpures de ses falaises schisteuses présentent d’excellentes facilités d’atterrissage et d’abri aux barques de pêche.

On ne compte pas moins de 60 petits havres fréquentés sur le pourtour de l’île. Trois seulement, régulièrement entretenus et classés, méritent le nom de port : Sauzon, Locmaria et le Palais. Les deux premiers sont des anses naturelles assez profondes, très bien abritées et que l’on a encore améliorées par deux modestes jetées ; ils sont uniquement fréquentés par les bateaux pêcheurs. Le Palais au contraire possède des installations complètes : un port d’échouage, un bassin à flot, un arrière-bassin, une série de quais facilement accostables, malheureusement un peu insuffisans pour les besoins de la navigation, qui est et restera toujours assez active. Le Palais est en effet en communication permanente