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II

Quand on remonte vers le Nord de la côte armoricaine, en quittant l’ancien archipel des Iles Vénétiques ou, pour parler la langue moderne, la longue péninsule du Croisic, on rencontre tout d’abord l’embouchure de la Vilaine. La Vilaine, quoique modeste à tous les points de vue, est le fleuve le plus important de la Bretagne ; c’est l’ancien Herius ou Erius de Ptolémée, la Dur-érié ou Dur-Hérié de la Table de Peutinger[1] dont le nom Erius rappelle celui du petit village de Brieux, situé à 40 kilomètres de son embouchure, et que traversait autrefois la voie romaine de Nantes à Vannes, dont on retrouve encore quelques vestiges[2]. La Vilaine présente une excellente entrée ; une petite rade de relâche d’abord à Tréhiguier, précieuse pour les navires surpris par le gros temps ; un petit port ensuite, à 15 kilomètres en amont, à la Roche-Bernard, où peuvent stationner les bateaux, pour laisser ou prendre des chargemens à destination ou en provenance de Redon. Le petit fleuve est navigable et fréquenté sur plus de 50 kilomètres. On passe à pleines voiles sous le magnifique pont suspendu de la Roche-Bernard dont le tablier est à 35 mètres au-dessus de l’eau, et on remonte ensuite au vent jusqu’à 7 kilomètres en aval de Redon. Quelques coudes nécessitent alors le secours du halage ; mais on descend sans peine avec le jusant.

Le port d’échouage de Redon n’est autre chose que la rivière elle-même dont la profondeur varie de 2m, 40 à 4 mètres suivant le flot. Une quarantaine de navires de 300 tonneaux peuvent venir y accoster et y mouillent à l’aise. Un bassin à flot est établi tout à côté, communiquant avec la Vilaine par une écluse marine, et ouverte à sa sortie sur le canal de Nantes à Brest. Les bateaux de mer s’arrêtent tous à Redon ; mais la navigation continue avec des chalands sur le canal et sur la rivière en amont. Redon se trouve ainsi au carrefour de plusieurs voies navigables : la Vilaine maritime qui conduit directement à l’Océan, la Vilaine fluviale qui se prolonge par le canal de l’Ille-et-Rance et conduit à la

  1. Ῥρίου ποταμοῦ ἐϰϐολαί (Priou potamou ekbolai). Ptol., II, VIII (VII), 1.
  2. Voies romaines de la Bretagne. Bull, monum., 1843. — Cf. René Kerviler, Réseau des voies romaines de la presqu’île armoricaine. Études archéologiques, op. cit.