Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/809

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui s’efforcent de les grouper et de les enrôler dans une vaste machine de guerre internationale destinée à faire sauter la société moderne.

En Angleterre, l’initiative privée et la liberté d’association semblent avoir donné tout ce qu’elles pouvaient donner, mais on s’aperçoit aujourd’hui que la base des unions est trop étroite. Il apparaît aux moins clairvoyans qu’il faut que le législateur et l’Etat interviennent pour donner à l’organisation corporative toute son ampleur et, toute son efficacité. Le gouvernement anglais l’a compris, et par une série de lois, il travaille à étendre à la masse des ouvriers les résultats obtenus par une élite. Dans cet ordre d’idées, le Parlement anglais a déjà voté les Factory’s Acl, qui généralisent et transforment en lois d’Etat les améliorations et les usages introduits par les trade-unions. C’est ainsi que, depuis 1875, la législation limite à cinquante-six heures et demie par semaine le travail des adultes. Le repos du dimanche est également obligatoire. La loi réglemente le travail des femmes et des enfans. Elle fixe un salaire minimum dans tous les travaux exécutés pour le compte de l’Etat, des villes et des corporations publiques. Elle organise l’inspection du travail et l’inspection des mines. Elle supprime le marchandage et les paiemens en nature.

Mais le gouvernement anglais n’a pas cru devoir se borner ù ces lois de réglementation ou de police. Il s’occupe de préparer d’autres lois qui rendent obligatoire le concours du patron aux dépenses corporatives ou qui mettent à sa charge certaines caisses alimentées jusqu’alors exclusivement par les ouvriers. Par exemple, la loi sur les accidens du travail, promulguée en juin 1897, et qui, mettant la réparation du risque professionnel à la charge du patron, enlève aux unions une de leurs plus lourdes charges. Il semble probable que des lois successives rendront également obligatoire, sous une certaine forme, le concours des patrons à l’alimentation des caisses de maladies et de retraites, ce qui permettrait à la grande majorité des travailleurs d’entrer dans les nouvelles unions dont le cadre se trouverait ainsi élargi.

Cela suffira-t-il ? Il est difficile de l’affirmer. Le gouvernement anglais pourra-t-il éviter la corporation obligatoire sans tomber ‘ dans la réglementation par l’Etat ? Nous ne pouvons préjuger de l’avenir, mais ce qu’il importe de bien constater, c’est que des corporations très fermées et très exclusives, dont le rôle et les