Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/771

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

concerne l’artillerie, vous avez cent fois raison ; notre supériorité est très grande, incontestée et incontestable à tous les points de vue. Nos bouches à feu, nos affûts, nos munitions, ont plus de puissance et de simplicité, sont plus militaires, en un mot, et mieux en ordre que tout ce qui existe chez aucune nation maritime, et, en particulier, chez les Anglais. Le personnel chargé des canons à bord de nos navires est mieux à la hauteur de sa tâche que celui d’aucune autre nation, grâce à de fréquens exercices, à de nombreux tirs à charge de combat, pour lesquels rien n’a jamais été économisé en temps de paix. Ce personnel a d’ailleurs naturellement, en qualité de Français, une aptitude spéciale pour l’emploi, dans le combat et la manœuvre, de l’artillerie à tir rapide et de l’artillerie de gros calibre en tourelle.

« Il y a des améliorations à faire, de grandes simplifications à réaliser : elles sont faciles. La réalisation n’entraîne pas de dépenses, au contraire. Mais permettez-moi d’ajouter que l’infériorité de vos navires que vous affirmez, que tout le monde, hélas ! affirme comme un dogme, n’est pas réelle. Ce sont les Anglais, vraisemblablement, qui entretiennent ces idées décourageantes, plus efficaces pour nous conduire à des lâchetés gouvernementales et à des défaites sur mer, que la puissance navale de l’Angleterre, ses nombreux navires, ses matelots très inférieurs aux nôtres et l’habileté de ses amiraux, — que la catastrophe de la Victoria ne recommande pas à l’admiration des connaisseurs.

LE MINISTRE. — Les questions de navires, de stabilité de combat, de faiblesse et de fragilité de nos appareils de chauffe, d’insuffisance de rayon d’action, de surcharge qui annule la protection, ne sont pas de votre compétence, mon cher général ; et permettez-moi, sur ce point, de considérer comme exacte mon opinion qui est celle de tous les amiraux, à peu près, et des membres les plus éclairés, les plus considérables de la commission extraparlementaire.

LE GENERAL DIRECTEUR. — Monsieur le Ministre, si je n’avais pas été là pour répliquer et intimider les détracteurs de parti pris, on dirait de notre artillerie plus de mal qu’on n’en dit de nos navires. C’est ce qu’on n’a pas cessé, d’ailleurs, de faire depuis 1861 jusqu’en 1893, en nous vantant l’artillerie Armstrong, qui coûtait cher et ne valait rien, et en discréditant notre propre artillerie de marine, qui valait beaucoup et qu’on appelait, par dérision, une