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contraire à l’indication précise de Ptolémée, qui dit formellement qu’il était voisin des embouchures de la Loire. Il existe d’autre part, au milieu même de l’ancien goulet du Croisic, qu’on appelle toujours le « Traict » pour rappeler que cette plaine de vase moderne a été autrefois un détroit navigable (trajectus, passage), deux petites localités à peu près inconnues, le Haut-Brévin et le Bas-Brévin ; et rien ne s’oppose absolument à y voir l’emplacement de l’ancien Brivates disparu qui leur aurait laissé son nom.

On ne saurait rien affirmer de précis à ce sujet ; et il est tout aussi naturel, et pour les mêmes raisons, de placer l’ancien port quelque part sur les rives du Brivet, qui est toujours, malgré la déviation de la partie inférieure de son cours, le grand collecteur de la Grande-Brière, et dont le nom semble être aussi le même que celui de Brivates modernisé. On peut alors hésiter entre plusieurs localités baignées autrefois par les eaux de la rivière, et on a tour à tour proposé Saint-Gildas-des-Bois, Pontchâteau et la petite anse abritée par le rocher de Penhouët. Le premier se trouve presque aux sources du Brivet, au fond du golfe de la Grande-Brière aujourd’hui presque atterri. Pontchâteau porte sans doute un nom moderne ; mais « Pont » n’est évidemment que la traduction latinisée du vieux radical celtique briv, brig, qui signifie indifféremment pont, passage d’eau, gué, s’applique à toutes les traversées de rivières, et qu’on retrouve dans beaucoup de noms de lieux anciens (Brivo-durum, Briare ; Samaro-briva, Amiens, etc. ). Or Pontchâteau est à la fois placé sur le littoral de l’ancienne Brière et est encore aujourd’hui traversé par les eaux du Brivet.

L’anse de Penhouët paraît cependant devoir être l’emplacement le plus probable de l’ancien port de Ptolémée. Il résulte en effet des études remarquables de M. l’ingénieur Kerviler, dont le nom est inséparable de tout ce qui se rapporte aux souvenirs anciens, aux transformations séculaires et à tous les travaux de la basse Loire[1], qu’à l’origine des temps, le Brivet n’avait pas son embouchure dans le grand fleuve à Méan, comme on le voit aujourd’hui, mais que ses eaux s’écoulaient dans la petite baie de Penhouët, au milieu de plusieurs îles, entre le rocher de Penhouët même et la pointe la Ville-Halluard située à 1 kilomètre environ du promontoire granitique de Saint-Nazaire ; que déjà,

  1. René Kerviler. Armoriaue et Bretagne (Recueil d’études sur l’histoire, l’archéologie et la biographie bretonnes, 3 vol. 1893).