Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

davantage la faculté de s’ériger en groupes autonomes, possédant un droit égal à obtenir éventuellement un ou plusieurs sièges.

Ainsi entendue, la représentation proportionnelle offre l’avantage de remplacer le régime de l’association forcée, résultant des relations de voisinage, parle régime de l’association facultative, fondé sur l’accord temporaire des volontés libres. Elle se prête, du reste, à la représentation spéciale des intérêts locaux ou même professionnels, s’il plaît aux électeurs de se grouper sur l’un de ces terrains. Elle peut aussi se combiner avec le maintien des anciennes circonscriptions électorales, pour autant que celles-ci sont pourvues chacune de plusieurs sièges. Toutefois, il faut observer que plus il y aura de mandats à répartir, plus il y aura de nuances qui pourront être représentées. D’un autre côté, comme aucun parti ne réunit exactement le chiffre de suffrages nécessaire pour qu’il n’y ait pas d’excédens, les déchets de voix perdues seront d’autant moins nombreux qu’il y aura moins de circonscriptions. À ce double point de vue, l’idéal serait le collège unique, réunissant tous les électeurs du pays. Mais il serait chimérique d’escompter un changement aussi profond de nos habitudes électorales.

Les proportionnantes, qui sont des esprits concilians par nature autant que par nécessité, ont compris tout au moins l’opportunité d’une transition, et ils se sont contentés partout de réclamer des circonscriptions assez étendues pour qu’on puisse introduire au parlement tous les partis suffisamment forts du pays. Rien n’empêche de conserver les subdivisions existantes, là où fonctionne le scrutin de liste, quitte à fusionner les districts voisins, là où règne le scrutin uninominal. Même dans ces conditions restreintes, la représentation proportionnelle ne peut-elle porter les fruits qu’en attendent ses partisans : rétablir la sincérité du régime parlementaire, garantir les droits des minorités, diminuer l’âpreté des luttes électorales, régulariser les oscillations du pouvoir, dégager les courans importans de l’opinion, et relever le niveau des assemblées législatives ?


III

Parmi les objections qu’a soulevées la représentation proportionnelle, se rencontre alternativement la crainte qu’elle ne favorise l’émiettement des partis et qu’elle ne les incite à des coalitions