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rappelle en outre des souvenirs bien autrement anciens, et c’est très certainement là qu’il faut placer le Portus Secor de Ptolémée et de Marcien, qui était le principal point d’attache de la flotte des Pictons et des Santons[1]. Les archéologues ont même cherché au mot secor une étymologie celtique ; mais il est plus vraisemblable et plus simple de le considérer comme une transcription du mot securus, qui indique que le port présentait, autrefois comme aujourd’hui, de très bonnes conditions de sécurité : Portus Securus, port de tout repos. On sait que ce genre d’altération grammaticale est très fréquent chez Ptolémée, qui grécisait assez volontiers les mots des auteurs latins et dont le texte reproduit à chaque instant les mots de φόσσαι, φόρος, κολονία, qui ne sont pas des mots grecs, mais une simple transformation des mots latins fossæ, forum, colonia[2]. Pornic a donc été certainement assez fréquenté avec raison à une époque très reculée. De nombreux souvenirs de l’époque celtique y ont été découverts un peu partout autour de la ville et du port, tumuli, menhirs, dolmens ; et tout le pays est parsemé de débris de monumens mégalithiques[3]. La nature du sol a d’ailleurs complètement changé depuis qu’on a quitté les marais de Bourgneuf. Plus de lagunes et de terres basses. La côte est devenue rocheuse. Les falaises de gneiss et de schiste commencent à découper leurs vives arêtes. Les vagues brisent partout sur des écueils. La mer elle-même n’a plus cette couleur grise et terreuse qu’elle garde presque toujours sur les côtes de Saintonge et dans le golfe du Poitou ; elle est verte, claire, écumeuse. C’est la Bretagne qui commence.

CHARLES LENTHÉRIC.
  1. Σικὸρ ou Σηκὸρ λιμὴν 17°, 40’ — 48°, 30’. Ptol., II, VII, 1. E. Desjardins, Gaule romaine, op. cit.
  2. Baron de Wismes, Réunion des Sociétés savantes des départemens à la Sorbonne (Journal officiel, 22 avril 1876).
  3. Σικὸρ ou Σηκὸρ λιμὴν 17°, 40’ — 48°, 30’. Ptol., II, VII, 1. E. Desjardins, Gaule romaine, op. cit.