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même prince, paraissait à beaucoup d’esprits la meilleure, peut-être la seule manière de concilier les vœux des peuples avec le maintien d’une dynastie alliée et chère à toutes les monarchies. Guillaume lui-même ne paraissait pas y répugner absolument, puisque, cédant à la force des circonstances et dans les derniers jours du combat, il avait proposé et fait voter la révision de la loi fondamentale par une session des États généraux, improvisée, et à laquelle, a la vérité, très peu de Belges avaient pris part.

Mais on pouvait très bien soutenir que, cette révision devant porter sur un des points principaux el essentiels de la Constitution dont la base avait été posée par les Puissances en 1814, ne pouvait être opérée sans le concours el le consentement des hauts contractans eux-mêmes. De là, la pensée de convoquer une réunion où les représentans de toutes ces puissances garantes auraient, de concert avec le roi des Pays-Bas, à délibérer (ce fut l’expression ambiguë dont on se servit) sur les meilleurs moyens de mettre un terme aux troubles qui avaient éclaté dans ses États. On mettrait ainsi toutes les parties en présence sans se prononcer d’avance sur ce qu’il pouvait y avoir de contradictoire d’incompatible dans leurs prétentions et dans leurs desseins.

Toutes les réunions d’hommes se ressemblent ; la convocation d’une conférence joue très souvent, en diplomatie, le même rôle que, dans un parlement, le renvoi à une commission d’une question délicate : c’est le moyen de mettre, pour un temps au moins, tout le monde d’accord. L’initiative prise par lord Aberdeen eut cet effet, car elle obtint tout de suite l’approbation, par des motifs peut-être assez différens, de tous ceux dont l’assentiment était nécessaire.

Pour la France, d’abord, à qui la première communication fut faite, c’était un avantage inespéré, car elle obtenait ainsi, du premier coup, la reconnaissance éclatante de son droit à siéger dans cet aréopage européen, où la Restauration elle-même n’avait été admise qu’après trois ans d’épreuve ; elle était dispensée aussi de recourir à une démonstration militaire, qui n’aurait pas été sans péril avec une armée encore mal remise d’un ébranlement révolutionnaire. À Berlin non plus, on n’était pas fâché de ne pas mettre sitôt à l’épreuve d’une guerre, dont l’issue serait toujours incertaine, la solidité d’un État artificiellement composé d’élémens encore peu compacts et mal unis. Quant à l’Autriche, la résurrection d’un Congrès était l’idée favorite et le rêve du