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CÔTES ET PORTS FRANÇAIS DE L’OCÉAN

ont été concentrés avec raison à l’entretien et à la consolidation du chenal actuel, celui qu’on avait une première fois obtenu en barrant l’Adour au Boucau, et qui est aujourd’hui définitivement fixé.

Une succession de digues de types différens rétrécissent graduellement le fleuve à mesure qu’il s’approche de l’Océan. Mais, si des jetées massives et formant saillie en mer ont l’avantage de projeter avec force le courant du fleuve contre le bourrelet de la barre, elles constituent de grands seuils transversaux qui arrêtent le courant littoral et provoquent, à droite et à gauche, des accumulations de sable considérables. La plage avance ainsi en même temps que les digues qui, par suite, doivent toujours être prolongées, si on veut conserver leur saillie. Tout autre est l’effet des jetées à claire-voie, qui présentent des vides à travers lesquels s’échappent les eaux chargées de sables en suspension. Ces sables ne se déposent plus ou se déposent en quantité bien moins considérable. La plage et la barre se maintiennent à peu près à la même place. Les jetées peuvent alors atteindre le seuil sous-marin qui obstrue l’embouchure ; et, malgré leurs vides, la chasse est encore suffisante pour creuser un sillon dans la barre et maintenir une passe variable sans doute, mais permettant presque toujours, sauf pendant les grosses tempêtes, l’entrée des navires de mer de 5 mètres environ de tirant d’eau.

C’est ce qu’on a trouvé de mieux jusqu’ici pour assurer une communication à peu près constante entre Bayonne et la mer. Les procédés, les modes de fondation, les dispositions générales des jetées à claire-voie, prolongeant en quelque sorte le fleuve en mer, ont pu varier avec les progrès de l’art de l’ingénieur. Palées en charpente, pilotis en fer, tubes de fonte, tourelles cylindriques en maçonnerie ont été successivement adoptés ; mais le principe est toujours le même et son application a jusqu’à présent donné de bons résultats[1].

En résumé, le cours inférieur de l’Adour n’est définitivement fixé que depuis les temps modernes. Dans la série des temps historiques, l’embouchure a certainement occupé bien des points de la côte depuis le rocher de Biarritz jusqu’au Vieux-Boucau. On ne sait pas si les Phéniciens, dans leurs va-et-vient continus le long des côtes de l’Ibérie, de la Gaule et de la Bretagne, entre

  1. Daguenet et Aube, Port de Bayonne. Ports maritimes de la France, 1887.