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Elle choque profondément ce que l’on appelle le sens chimique. Des atomes de chlore voguant librement à côté d’atomes d’hydrogène, Bans se précipiter immédiatement sur eux ! comme les y incite ce que Saigey appelait d’une manière pittoresque « leur passion moléculaire » augmentée ici de la passion électrique I


VI

Nous allons en venir à ces objections indignées. Auparavant, demandons-nous pourquoi le savant chimiste suédois, allant au bout dans la voie ouverte par Grotthus qui séparait les ions dans la molécule de l’électrolyte tout en les laissant réunis, puis par Clausius qui en délivrait un petit nombre, les a enfin libérés tous ou presque tous.

C’est, pour le dire en un mot, qu’il y était conduit, et en quelque sorte contraint par la nécessité de rendre générales et applicables à tous les corps les lois de l’osmose établies par les expérimentateurs, Dutrochet, Pfeffer, de Vries, uniquement pour la classe des substances qui ne sont pas électrolytes. Ces lois se résument, comme l’on sait[1], dans cette formule d’une simplicité admirable : La pression osmotique ne dépend pas de la nature du corps dissous, mais seulement du nombre de molécules qu’il apporte dans la solution ; ou, d’une manière plus brève : toute molécule dissoute, quelle qu’elle soit, exerce la même pression osmotique. L’hypothèse de la dissociation des électrolytes permet d’étendre cette loi à tous les corps de la nature, à la condition d’entendre par molécule, aussi bien la molécule électrolytique que la molécule chimique.

Même succès pour la généralisation des lois relatives aux points de congélation des solutions et à leurs tensions de vapeur. Grâce à l’hypothèse d’Arrhénius, il est permis de dire que chaque molécule, quelle qu’elle soit, déprime de la même quantité la tension de vapeur et abaisse le point de formation de la glace du même nombre de degrés.

La théorie des ions rend compte de bien d’autres faits restés jusqu’ici sans explication, relatifs aux propriétés des solutions. Tel, par exemple, le fait de la constance de la chaleur de neutralisation des ici des et des bases en solution étendue.

La mise en présence d’un acide et d’une base donne lieu à un

  1. Voir la Revue du 1er avril 1899.