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aux passions une forme spéciale : violence innée, impulsivité souvent irrésistible dans les momens de paroxysme, jointe à l’empire habituel sur soi-même. On rencontre ce tempérament en Italie, notamment dans l’Italie méridionale ; on le trouve aussi en Espagne, où dominent les Méditerranéens bruns à crâne long. On ne le trouve guère en France, même parmi nos Méridionaux et nos Méditerranéens, qui ont bien la vivacité impulsive, mais qui ont l’expansion plutôt que la concentration sur soi, plutôt que l’intérieur fermé des Italiens ou des Espagnols.

Le tempérament tient lui-même en grande partie au climat. Les climats ne sont pas plus identiques que tout le reste chez les nations néo-latines. Ils ont un seul caractère commun : c’est d’être plutôt tempérés, avec des mélanges de chaud et de froid qui sont sensibles quand on passe de Naples à Turin, de Grenade à Madrid, de Marseille à Paris. Si les Néo-Latins sont peu pessimistes, cela tient à leur climat tempéré. On ne peut vraiment exiger que, sous un ciel ensoleillé, l’Italien, l’Espagnol et le Français même nourrissent l’humeur sombre des brumes anglo-saxonnes. Un climat plus doux n’opère pas une sélection aussi rigoureuse en faveur des constitutions fortes et des volontés fortes qu’un climat où la lutte incessante et pénible élimine presque tous les faibles. C’est là le secret de certaines supériorités attribuées aux races du Nord, ainsi que d’une certaine tendance à la mollesse dans les races du Midi. Le climat chaud produit une certaine précocité chez les jeunes gens, les fait parvenir plus tôt à la puberté, les éveille et les excite davantage ; d’où il suit que l’éducation est moins longue et a moins de prise, qu’une certaine fermentation est dans le sang, qui rend la sagesse plus difficile. M. Ferrero a voulu déduire de là des conséquences innombrables. Toute l’école lombrosienne a l’habitude de s’attacher à un détail et de l’enfler outre mesure afin de faire prendre la grenouille pour le bœuf. Sans nier l’influence du climat et celle de la précocité juvénile sur les « passions de l’amour, » nous ne saurions voir dans l’ « érotisme » chronique le secret des destinées néolatines.

Pour la sobriété et la tempérance, qui est aussi une de ces grandes vertus à la fois physiques et morales dont l’action est profonde chez les peuples, les vrais Latins pourraient donner de belles leçons aux faux Latins comme nous, et aussi aux Anglo-Saxons ou aux Germains. Que ne sommes-nous tempérans comme