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chaux encore caustique au moment des chaulages, et comme l’acide phosphorique est nécessaire à la vie végétale, que de son abondance ou de sa rareté découlent les grands rendemens ou les maigres récoltes, l’épandage des amendemens calcaires, en le réveillant de sa torpeur, a exercé longtemps, sur la fertilité des terres parcimonieusement fumées, une action décisive, amoindrie aujourd’hui par l’emploi de plus en plus fréquent des engrais phosphatés.

La chaux favorise-t-elle l’assimilation, par les végétaux, de la potasse contenue dans le sol ? Nous ne le savons encore qu’assez mal. Quand on lave une terre avec une petite quantité d’eau, on n’extrait que très peu de potasse et on serait tenté, au premier abord, de croire que cette base est engagée dans des combinaisons insolubles ; mais, si on procède à des lavages multipliés en y employant, par exemple, un poids d’eau dix fois supérieur à celui de la terre, on extrait, en général, une quantité de potasse notable. La potasse est donc soluble, mais retenue par une propriété fort curieuse, que présentent surtout les terres argileuses chargées d’humus, la propriété absorbante ; si en effet, on fait filtrer sur une terre de cette nature une dissolution étendue de carbonate de potasse dont le titre ait été déterminé avec soin, on trouve dans le liquide d’égouttement qui a traversé la terre, une quantité de potasse beaucoup moindre que celle qu’il renfermait primitivement ; elle a été retenue comme le serait la matière colorante du vin rouge, ou les matières brunes qui apparaissent pendant l’extraction du sucre des betteraves, par du noir animal. La chaux, en coagulant l’argile, en précipitant l’humus, amoindrit-elle ces propriétés absorbantes ? c’est ce que nous ne savons encore que très imparfaitement.

La potasse est au reste si répandue dans les terres argileuses, les engrais potassiques y réussissent si rarement, qu’il n’y a pas lieu d’insister sur l’influence qu’exercent les amendemens calcaires sur la potasse des terres arables ; il convient, au contraire, de rappeler que la chaux permet de cultiver avantageusement des terres stérilisées par la présence du sulfate de fer, matière vénéneuse pour les végétaux, qui apparaît parfois par oxydation de la pyrite blanche[1].

  1. Voyez la Revue du 1er juin 1898.