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désignée, à cause de sa blancheur et de sa finesse, sous le nom de farine de chaux. Il est douteux qu’elle ait été employée aux usages agricoles dans l’antiquité, et c’est dans le Théâtre d’agriculture qu’écrivit Olivier de Serres, sous Henri IV, qu’il est fait mention pour la première fois du chaulage des terres.

La chaux et la marne ne sont pas les seules matières calcaires utilisées par la culture. La mer apporte dans les anses que présente le littoral rocheux et tourmenté de la Bretagne et de la Manche, des sables coquilliers, très riches en calcaire et désignés sous le nom de langues ou de trez ; ils sont répandus avec grand avantage sur les terres granitiques et schisteuses de ces contrées.

Plusieurs industries abandonnent des résidus calcaires qui sont encore employés par la culture ; telles sont les chaux d’épuration du gaz et surtout les écumes de défécation des sucreries. On sait que, pour clarifier les liquides renfermant le sucre extrait des betteraves, on les soumet à l’action d’un lait de chaux, c’est-à-dire de chaux délayée dans l’eau ; cette chaux est ensuite précipitée par un courant d’acide carbonique ; en descendant lentement dans le liquide, la matière ténue, ainsi formée, entraîne les impuretés et les jus deviennent assez clairs pour être envoyés aux chaudières d’évaporation[1]. Le carbonate de chaux provenant de cette opération est soumis à une forte pression, pour faire écouler le liquide sucré qu’il retient, puis est vendu aux cultivateurs.

Ils ont donc à leur disposition de la marne, des sables coquilliers, des écumes de défécation et des chaux d’épuration du gaz, mais toutes ces matières ne renferment pas une quantité de chaux suffisante pour pouvoir supporter des frais de transport élevés, et on les emploie à peu de distance des lieux d’extraction ; les sables coquilliers ne pénètrent qu’à 5 ou 6 kilomètres dans l’intérieur des terres ; les écumes de défécation sont réservées aux fournisseurs de betteraves des sucreries, la marne est habituellement répandue à proximité des gisemens, la chaux seule présente une assez grande valeur pour supporter des parcours en chemin de fer de quelque étendue.

Les quantités répandues varient d’une contrée à l’autre ; aux environs de Dunkerque, l’hectare reçoit de 40 à 50 hectolitres de chaux (135 kilos par hectolitre) tous les dix ou douze ans ; les doses usitées dans la Mayenne sont analogues aux précédentes ;

  1. Voyez la Revue du 1er murs 1897 ou les Plantes de grande culture.