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ou Hambourg. Le City of Cork venait de Londres, où il avait séjourné quelque temps.

C’est donc à Londres que l’épidémie aurait dû se déclarer. Il est vraisemblable que, grâce à la perfection de l’organisation hospitalière de cette ville, elle y aurait été étouffée sur place, sans bruit, et peut-être sans être reconnue. Des faits de ce genre doivent arriver quelquefois. Il y en a eu un exemple, en tous cas, en 1896. Trois pestiférés, dont la maladie n’avait pas été reconnue d’abord, ont séjourné dans les salles communes, sans qu’il y ait eu contamination du personnel hospitalier ni des autres malades.

Les premières victimes, à Oporto, furent les débardeurs qui avaient travaillé au débarquement. Comme il arrive au début de toute épidémie, les tout premiers cas qui se produisirent, avant que l’opinion publique eût été mise en éveil, échappèrent à l’attention. La véritable filiation ne s’établit que d’une façon rétrospective. Le mal avait déjà fait des progrès quand il fut nettement reconnu par un médecin bactériologiste, directeur du Laboratoire municipal d’hygiène de Porto, le docteur Jorge. L’existence du fléau, officiellement constatée, fut notifiée par le gouvernement portugais aux représentans étrangers, conformément à l’un des articles du règlement édicté par la conférence sanitaire de Venise. A partir de ce moment, les consuls ne délivrèrent plus que des patentes jaunes aux navires qui sortaient. Telle est la manière de parer à la dissémination du fléau par la voie de mer.

D’autre part, pour empêcher la diffusion par la voie de terre, le gouvernement établit autour de la ville un cordon sanitaire et arrêta le mouvement des chemins de fer et des transports.


L’établissement d’un cordon sanitaire autour d’un lieu contaminé est un de ces remèdes que l’on appelle en médecine héroïques, à cause des épreuves auxquelles il soumet le patient. Il peut être ou n’être pas efficace ; il impose, en tous cas, de pénibles sacrifices à ceux qui le subissent. Pour réussir à préserver les contrées avoisinantes, il faut que le blocus soit effectif ; il faut avant tout qu’il soit possible. En un mot, il a ses indications et ces contre-indications. Lorsqu’il s’agit de petites agglomérations de populations agricoles qui possèdent des ressources suffisantes d’alimentation pour n’avoir pas besoin de se ravitailler au dehors et qui peuvent être maintenues inflexiblement à