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être interrogé par le Comité, pour finir le supplice qu’il éprouve, étant séparé d’une épouse chérie à qui ses soins sont indispensables.

Il a présenté le 22 thermidor une pétition au Comité de sûreté générale.

B. L. CASTELLANE.

En réalité, aucune « calomnie » nouvelle n’était venue noircir Castellane, depuis son arrestation, et ce n’était point par mauvais vouloir que le Comité de sûreté générale tardait ainsi à s’occuper de lui. On avait même décidé, le 4 fructidor, qu’il ne passerait pas en jugement, et qu’on signerait sa mise en liberté sur le simple vu de son acte d’arrestation. Mais, avec les meilleures intentions du monde, le Comité n’avait pas le temps de s’occuper de lui. Et ce n’est que le 22 vendémiaire que, sur le rapport de Legendre, le prisonnier obtint enfin son élargissement. Il quitta la Maison Egalité le lendemain, après que le concierge, le fameux Haly, lui eut remis le certificat que voici :

MAISON D’ARRÊT ÉGALITÉ

Extrait d’écrou délivré en exécution de la loi du huit messidor dernier sur les rentes viagères.

Le nommé Castellane, Boniface-Louis-André, est détenu dans cette maison, par ordre des autorités constituées, depuis le 27 floréal dernier[1], et dont il est sorti aujourd’hui, vingt-trois vendémiaire, troisième année de la République française une et indivisible.

HALY, concierge.

Trois jours plus tard, le 26 vendémiaire, le prisonnier libéré comparut solennellement devant le maire, les officiers municipaux, et l’agent national de la commune d’Aubergenville, à qui il présenta son « extrait de liberté, » signé par six membres du Comité de sûreté générale : Legendre, Goupilleau de Fontenay, Lesage, Bentabole, Reverchon, et Clauzel. Acte lui fut donné de sa comparution, conformément à la loi, « pour lui servir et valoir ce que de raison. »


II

Telle est, en résumé, l’histoire des « prisons » du marquis de Castellane. Elle aurait pu, assurément, fournir la matière d’un récit bien curieux, si le père du maréchal avait eu, comme plus tard son fils, l’habitude de noter au jour le jour les événemens de

  1. Haly se trompe de date : c’est le 27 thermidor que Castellane est entré au Plessis, ainsi qu’en fait foi le registre de la Préfecture de police.