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L’AVENIR DE CUBA

« L’horizon tropical inondé d’un éther intense ; l’Atlantique entre le bleu céleste et l’opale rosé, comme une perle monstrueuse ; les récifs d’or émaillés de coquilles et de nacres ; les écueils couverts de plantes aquatiques qu’animent d’innombrables infusoires ; les bouches du fleuve ceintes de grands roseaux et de bambous, flottant ainsi que de gros vases, ainsi qu’une forêt de fleurs mobile ; et là-bas, dans le lointain, des montagnes revêtues d’un vernis de lilas et de pourpre dont les tons ressemblaient à des condensations de lumière ; le feuillage si enchevêtré qu’on eût dit un mur impénétrable de verdure, et si coloré qu’on eût dit une palette chargée de nuances indéfinissables et toutes gaies comme des arcs-en-ciel solides ; ces familles d’insectes comparables à des rubis et à des émeraudes et à des saphirs et à des turquoises et à des opales qui auraient des ailes ; l’incessant mouvement des papillons, dans les volantes membranes desquels semblaient s’être réunis l’ocre, le vermillon, l’indigo et toutes les réverbérations du prisme poli pour qu’ils parussent des bouquets aériens ; les herbes de mille formes variées avec des ornemens de fleurs, lesquelles illuminaient les yeux de leurs pétales et affolaient le cerveau de leurs forts et pénétrans arômes ; le tissu épais des lianes ou des plantes grimpantes, qui s’étendaient à terre comme un tapis persan, et comme des châles d’Asie d’un arbre à l’autre, par les cimes ; le vol perpétuel des oiseaux-mouches et des perroquets et des colibris aux plumages plus brillans que des soieries de Catay ; le chœur des francolins et des rossignols accompagné du cri-cri des cigales qui jamais ne chantent,