Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 155.djvu/384

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tente. Au retour, avec les images d’autres pays, d’autres peuples, d’autres mœurs, d’autres idées qu’on rapporte, il y a encore l’intime jouissance du cœur rempli de reconnaissance pour les bienveillances, les accueils aimables rencontrés sur la route, qui font croire à une bonté universelle.


I. — LA BIRMANIE

La partie méridionale de la Birmanie peut être comparée, pour son climat et la richesse de son sol, à notre belle colonie de Cochinchine, tandis que la Birmanie septentrionale correspond au Tonkin, mais un Tonkin plus secret, dans le nord, encore moins habité que notre haut Tonkin. Les États shans sont semblables à notre haut Laos, avec une plus grande exubérance tropicale.

Des charmes que j’ai trouvés dans les trois mois de voyage passés dans cette colonie anglaise, j’adresse ici tous mes remerciemens aux Anglais, nos terribles rivaux en Orient, mais les hôtes les plus parfaits qu’un voyageur puisse rêver. Ils ont le génie de l’hospitalité et de l’assistance pratique.

J’arrivai en Birmanie à la fin de novembre 1896. La ville de Rangoon, au milieu de son estuaire, dans les bouches de l’Irrawaddy, ne laisse apercevoir au loin que la pointe dorée de sa grande pagode, première évocation de son glorieux passé bouddhique. Elle s’étend sur une longue plaine sablonneuse qui ne fait rien présager de la riche et élégante Burma. Un immense delta sous-marin, formé par les sables des trois grands fleuves birmans, l’Irrawaddi, le Sittang et le Salouen, précède le continent. On dit qu’à 100 kilomètres du rivage, la sonde touche à 75 mètres de profondeur, tandis qu’au de la de ces bancs, les abîmes sous-marins se creusent jusqu’à 2 000 mètres.

Malgré le beau lac verdoyant dont les sinuosités semblent des lacs successifs et qui lui font de si rians environs, Rangoon ne peut être comparé à Saigon, qui est bien la plus belle ville européenne de tout l’extrême Orient. Mais la ville anglaise reprend le premier rang dès qu’on l’envisage au point de vue économique, et que l’on considère le grand mouvement de son port et la vitalité commerciale que révèlent partout sur les lignes de ses quais les innombrables navires et les hautes maisons à plusieurs étages, où pullulent des offices de toutes sortes.

La chose qui mérite le plus, à Rangoon, de retenir l’attention