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historique est suffisamment hors de doute pour que je me sois cru en droit d’en rappeler l’importance. Quant à sa valeur littéraire, on comprendra que je laisse à d’autres le soin de l’apprécier. Je voudrais seulement qu’au lieu de continuer à répéter sur Lucrèce des jugemens plus ou moins suspects, et en tout cas surannés, on prît la peine de la lire, et de se rendre compte par soi-même de ses qualités et de ses défauts. Comme le disait Lamartine, elle a marqué une date dans l’histoire de notre littérature dramatique : je voudrais que l’on comprît de quelle révolution elle a « marqué la date, » et si vraiment, ainsi que l’ont prétendu ses premiers adversaires, — voire quelques-uns de ses premiers amis, — elle a donné le signal d’une réaction contre le goût nouveau, ou si elle n’a pas été plutôt un peu en avant dans le chemin d’un art plus libre et plus naturel. C’est en tout cas de cette façon que l’avait conçue son auteur. 3Je me suis efforcé de ramener le vers du drame à une simplicité extrême, — écrivait-il, — et je me suis donné pour arriver à ce résultat autant de peine que d’autres pour entasser les images éclatantes et les idées ambitieuses. » Admirateur passionné des conquêtes du romantisme, tout son effort n’a eu pour objet que de les « simplifier, » en y mettant moins d’artifice et plus de vérité.


F. PONSARD.