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Laokaï à Yunnan-Sen se heurte à d’immenses difficultés naturelles puisqu’elle doit s’élever de l’altitude de 150 mètres à celle de 2 000 pour redescendre ensuite à 1 300. On fait valoir cependant en sa faveur les richesses minières du Yunnan ; il se passera longtemps, il est vrai, avant que celles-ci ne soient bien exploitées ; elles ne paraissent pas comprendre de houille, du moins de houille de bonne qualité ; elles sont peut-être exagérées ; en tout cas la voie ferrée n’a pas, pour alimenter ses recettes, en attendant leur ouverture, le trafic qu’assure aux lignes du nord et du centre la présence d’une population très dense, et le transport des produits agricoles. C’est donc une ligne d’un avenir assez aléatoire que ce chemin de fer du Yunnan, mais, compris pour 70 millions dans le programme de travaux publics indo-chinois adopté en décembre dernier par les Chambres françaises, il sera néanmoins le premier à être exécuté dans le sud de la Chine.

Nous avons terminé l’énumération des lignes dès aujourd’hui concédées par le gouvernement chinois ; leur longueur totale s’élève au chiffre déjà respectable de 9 000 kilomètres, non compris les voies projetées dans le Chansi et le Honan par le syndicat anglais chargé d’exploiter les mines de ces provinces, voies dont la direction n’est pas encore bien déterminée. En outre, quoiqu’il soit bien difficile de savoir ce qui se passe exactement à Pékin dans le jeu compliqué des négociations entre les représentans des puissances rivales et les diplomates chinois, cauteleux et fuyans, toujours prêts à reprendre leur parole sous le moindre prétexte, le Tsong-li-Yamen a consenti en principe, — ou est censé avoir consenti, d’après ce qu’affirme le gouvernement britannique, — à la prolongation des voies ferrées birmanes à travers le Yunnan jusqu’au Yang-tze-Kiang. Il y aurait là 1 000 ou 1 200 kilomètres à construire à travers de très hautes montagnes coupées de gorges profondes, perpendiculaires à la direction générale de la ligne, en un pays presque désert, car l’ouest du Yunnan qui regarde la Birmanie est encore bien moins peuplé que l’est de la province qui domine le Tonkin. Un voyageur anglais disait que ce chemin de fer n’était pas sans doute impossible, à condition toutefois qu’on voulût bien percer pour l’établir une demi-douzaine de tunnels du Mont-Cenis. Son importance commerciale est nulle, mais les Anglais y tiennent pour des raisons stratégiques, et ils prétendent avoir découvert, en ces derniers temps, une route à peu près praticable.