Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 155.djvu/110

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sous la pression énergique de l’Europe, à ouvrir enfin les portes à la locomotive, les projets, bien ou mal conçus, sont plus nombreux que jamais.

Les concessions de chemins de fer, aussi bien que de mines, ont suscité bien des rivalités et fait l’objet de négociations compliquées et laborieuses entre la Chine et les diverses puissances dont les nationaux se les disputaient. Nous n’entrerons pas ici dans le détail de ces luttes diplomatiques, que nous avons déjà étudiées. Considérant les faits tels qu’ils sont accomplis, nous allons examiner d’abord les diverses lignes dont l’exécution est prochaine, et les perspectives qu’elles présentent, puis nous étudierons les effets que pourra ressentir la Chine de ces travaux et des autres réformes qui vont modifier si brusquement et si profondément les conditions où elle vit depuis plus de vingt siècles, et les conséquences qui devront en résulter pour les diverses puissances de l’Occident, selon la part qu’elles auront prise à cette transformation.


II

Parmi les 10 000 kilomètres de chemins de fer qui doivent venir s’ajouter aux 480 kilomètres du réseau du Petchili et aux 18 de Shanghaï à Woosung, rétablis l’année dernière, les premiers qui aient été concédés sont les chemins russes de Mandchourie, officiellement qualifiés « Chemins de fer de l’Est-Chinois : » 1 425 kilomètres pour la section située en territoire chinois du transsibérien proprement dit qui aboutit à Vladivostok par Tsitsikar et les environs de Kirin ; 800 kilomètres à peu près pour l’embranchement qui relie cette section à Port-Arthur ; plus un autre court embranchement qui se détache du précédent pour aboutir au port ouvert de Newchwang, à l’extrémité septentrionale du golfe de Petchili. Ces lignes sont entièrement entre les mains du gouvernement russe, principal actionnaire de la Compagnie de l’Est-Chinois, dont le conseil d’administration n’est en fait qu’une dépendance du ministère des Voies et Communications de Saint-Pétersbourg. Construites à la même largeur de voie que les autres chemins de fer russes, formant le débouché du Transsibérien, les lignes de Mandchourie ont une importance stratégique énorme. Elles peuvent, d’autre part, compter sur un trafic très intense de voyageurs, sinon de marchandises,