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travers les dunes croulantes, avec de brusques échappées sur la plaine d’en bas.

Toujours des sables, des sables, des sables à perte de vue, immense désert d’or sous le ciel bleu. Messaoud, qui enfonce parfois à mi-jambe, se traîne péniblement et il me faut le laisser aller seul à notre suite et grimper sur le dos d’un chameau.

Ouargla ! Là-bas, dans un bas-fond, entouré du chaos des dunes fauves, une plaine tout unie ; de longues traînées de sel qui, comme de la neige, étincellent ; une île de sombres palmiers moutonnans ; un mur de terre séchée au-dessus de fossés d’eau fétide ; un entassement de maisons, d’une laideur superbe sous la grande lumière et dominées par une haute tour. C’est là que nous descendons, nous enfonçant de plus en plus dans la fournaise qu’est ce bas-fond, où la chaleur qui tombe du ciel se double de la chaleur que renvoient les murailles de sable.

A l’entrée du lac desséché, que les Arabes appellent chott, un homme en manteau noir est assis, à côté de son cheval. C’est un cavalier du bureau arabe, que le lieutenant Boucherie envoie à notre rencontre pour nous saluer. Ensemble nous continuons notre route. La traversée du chott en plein midi est singulièrement pénible, sous le soleil brûlant, sur la terre brûlante, dans la réverbération des nappes de sel, au milieu des mirages. Nous allons vite, dans la hâte d’arriver. Puis ce sont les chemins de l’oasis, à l’ombre des dattiers, au bruit de l’eau courante ; une porte monumentale, une inscription en l’honneur de Flatters, et enfin la place du bureau arabe, où le lieutenant Boucherie, qui nous attend, nous souhaite aimablement la bienvenue.


PAUL PRIVAT-DESCHANEL.