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Chez nos voisins, sauf Newmarket, organisé par le Jockey-club, et Ascot, qui appartient à peu près à la Couronne, la plupart des réunions sont aux mains de spéculateurs et les actions sont souvent cotées très haut, témoin celles d’Epsom, de Sandon ou d’Alexandra-Park. Le total des prix décernés annuellement, en plat, dans la Grande-Bretagne, atteint 12 731 000 francs, contre 6 672 000 en France, Le chiffre des courses de cette catégorie y est de 1 921, tandis qu’il n’est chez nous que de 1 397. L’effectif des chevaux entraînés est du reste presque double : 3 571, l’an dernier, de l’autre côté du détroit, et 1 921 dans notre pays. Si toutefois, malgré les progrès énormes que nous avons réalisés depuis trente ans, — en 1869, le nombre des courses était de 1 996 en Angleterre et de 360 seulement en France, — nous n’occupons encore, avec notre Grand Prix de 200 000 francs, que le second rang, laissant fort loin en arrière les grands prix de Berlin, Bade ou Cologne qui ne dépassent pas 125 000 francs, mais devancés par les Anglais qui distribuent trois prix de 250 000 francs chacun, il est juste de reconnaître que cet argent est, sur notre sol, fourni aux éleveurs par le public, tandis qu’il sort, dans le Royaume-Uni, de la poche même des propriétaires. Ceux-ci doivent, sous forme d’« entrées » qui coûtent parfois jusqu’à 12 000 francs par cheval, en fournir le montant. Lorsque le total de ces engagemens n’atteint pas la valeur du prix, celui-ci risque de n’être pas couru, comme il est déjà arrivé pour l’Éclipse-stake de 10 000 souverains.

Est-ce à ce régime que l’on doit attribuer la différence de caractère des courses anglaises et françaises ? En Angleterre, les handicaps et les prix à réclamer, autrement dit les épreuves destinées aux chevaux d’un mérite secondaire, représentent 50 pour 100 de la masse des sommes distribuées ; en France, 28 pour 100 seulement. Les courses pour chevaux de deux ans, qui ne dépassent pas ici 12 pour 100 des prix, absorbent en Angleterre 29 pour 100 du total ; quoique la meilleure race soit celle que l’on peut faire travailler de bonne heure, et que le cheval de sang soit en effet plus précoce qu’aucun autre, les sportsmen anglais reconnaissent aujourd’hui le danger d’exagérer ces courses, où prennent part des animaux trop jeunes dont les os sont incomplètement formés. Ils ont également senti l’inconvénient des courtes distances, dont l’abus a pour résultat de « briser le cœur » des bêtes, que l’on doit précipiter dans leur train. Or, sur les hippodromes britanniques,