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avait, dans la circulaire du 18 octobre 1870, affirmé que l’occupation de Rome n’amoindrirait en aucune façon la situation du Saint-Siège. La loi des garanties avait à plusieurs reprises trouvé d’intelligens commentateurs, qui voulaient faire comprendre et qui semblaient prouver que le Saint-Siège, grâce à cette loi, était plutôt rehaussé. Le Vatican, sceptique, attendait la première épreuve solennelle ; et tous les amis de l’Italie royale auguraient avec confiance qu’elle se tirerait de cette première épreuve avec son élégance coutumière. Mais le hasard voulut que M. Visconti-Venosta ne rentrât aux affaires qu’au printemps de 1899 et qu’il eût comme prédécesseur M. l’amiral Canevaro. Or, M. l’amiral Canevaro avait fait une démarche sur laquelle le Quirinal ne pouvait revenir ; et M. Visconti-Venosta dut, à son corps défendant, accepter l’onéreuse succession d’une politique qu’il regrettait.

Dans la première quinzaine de février, à peu près à la même heure où le cardinal Rampolla délimitait, avec un tact scrupuleux, les questions qui lui paraissaient relever de la compétence du Saint-Siège, et celles, plus techniques, que cette puissance morale s’abstiendrait d’aborder, M. l’amiral Canevaro, ministre des Affaires étrangères du royaume d’Italie, signifiait au gouvernement du Csar et au gouvernement de la reine Wilhelmine, qui avait accepté de donner l’hospitalité à la conférence, que le Saint-Siège devait être tenu à l’écart de toutes les questions. Les juristes propices à la Consulta se mirent immédiatement à l’œuvre ; et tout d’un coup l’on vit surgir des commentaires nouveaux de la loi des garanties, commentaires absolument inverses de ceux qui étaient proposés à l’opinion européenne depuis trente ans.

Dans une grande revue, un professeur de Sienne expliquait que le Pape n’est point propriétaire des palais apostoliques eux-mêmes, et la preuve en était que la loi des garanties déclare ces palais inaliénables ; il expliquait que les hauts personnages envoyés auprès du Pape, par les souverains et par les républiques, avec le titre d’ambassadeurs, n’avaient point, à proprement parler, un caractère diplomatique et que leur mission était plutôt d’ordre administratif ; et la preuve en était que l’article II de la loi des garanties prévoit la présence auprès du Pape d’« envoyés des gouvernemens extérieurs, » mais qu’on y cherche en vain les mots « agens diplomatiques, États, puissances, souverains. » Tous les commentaires étaient à l’avenant ; et l’on ne sera pas surpris