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III

Sous quelles influences se produit l’inflammation de l’appendice ? C’est une question sur laquelle il y aurait le plus grand intérêt à être fixé. Elle a donné lieu à de nombreuses discussions, et à des théories ingénieuses. Elle n’est pas entièrement élucidée.

Il y a, comme nous l’avons dit, des sujets prédisposés par l’âge, et les habitudes alimentaires ; il y en a aussi par l’hérédité. Les appendicites sont fréquentes dans certaines familles. M. Roux (de Lausanne) a noté l’hérédité dans près de la moitié des cas. M. Dieulafoy fait de cette affection une manifestation de la même diathèse qui se traduit par la goutte, le rhumatisme, la gravelle. Beaucoup de chirurgiens la considèrent comme un patrimoine familial.

Mais il ne s’agit là que d’une prédisposition aux accidens intestinaux. Pour en provoquer l’explosion, il faut une cause déterminante. Cette cause, M. Talamon estime que c’est la pénétration d’un corps étranger dans la cavité du diverticule.

L’examen d’un grand nombre d’appendices malades avait montré dans leur intérieur l’existence d’un corps étranger. On y trouvait, obstruant plus ou moins le conduit, une masse solide, une sorte de dépôt formé autour d’un pépin, d’un noyau de cerise, de graines de groseilles ou de fraises ; d’autres fois, c’était un fragment d’os, une arête de poisson, une épingle, un corps dur. L’opinion vulgaire a incriminé les écailles d’huîtres et, plus récemment, les débris d’émail arrachés aux ustensiles de cuisine : quelques médecins ont donné créance à cette supposition. Les ustensiles de tôle émaillée, plats et casseroles, tendent à devenir d’un usage de plus en plus commun et qui s’explique par la modicité de leur prix et la facilité qu’il y a à les tenir propres. Lorsqu’ils sont soumis à des alternatives de chauffe et de refroidissement, l’inégale dilatation du métal et de sa couverte d’émail suffit à craqueler celle-ci et à en détacher des éclats qui peuvent être mêlés aux alimens et absorbés avec eux. Ces parcelles d’une matière formée de silicates alcalino-terreux et métalliques, c’est-à-dire absolument réfractaire aux agens digestifs, puisqu’elle l’est aux actions chimiques les plus énergiques, peuvent évidemment s’arrêter dans le cæcum à l’orifice du conduit appendiculaire, comme les graines et les noyaux de fruit.

Pour s’y engager, il ne leur faut plus qu’une circonstance favorable, une occasion. Elle est facile à imaginer. Une pression forte, un coup,