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je dois dire qu’à mes yeux, ni l’enseignement du Droit, ni celui de la Médecine, ne sont de l’enseignement supérieur, mais du haut enseignement professionnel, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. En ce cas, la culture classique demeurant le fond de l’enseignement secondaire, il suffit d’alléger le programme du baccalauréat, et on n’a pour y réussir qu’à le supprimer comme programme. Le programme du baccalauréat, première partie, n’est autre que le programme de la classe de rhétorique, et, pour la seconde partie, que le programme de la classe de philosophie. Disons-le donc, sans plus ! et ne rédigeons pas de programme particulier du baccalauréat. Mais, en revanche, assurons-nous que nos classes de rhétorique et de philosophie sont bien faites, je veux dire comme elles devraient l’être ; que, dans le cours de son année, le professeur d’histoire, par exemple, a rempli la totalité de son programme ; et soumettons nos élèves à de fréquentes interrogations. C’est en effet ce que les victimes de l’examen vont chercher dans les boites à bachot : des interrogations fréquentes, qui fortifient la mémoire en la soulageant ; et c’est ce qu’ils étudient avec rage dans leurs Manuels : les parties du cours que le professeur n’a pas eu le temps de traiter. Un jeune professeur fait étalage de son érudition ; il s’attarde complaisamment aux parties du programme qui l’intéressent lui-même ; la fin de l’année scolaire arrive ; et, partant pour les eaux, pour la montagne ou pour la mer, il laisse à ses élèves le soin de se débrouiller de leur examen comme ils voudront ! On pourra d’ailleurs encore, pour le grec, pour le latin, pour le français, — pour ce que les candidats appellent « les auteurs. » — leur demander, en produisant leurs pièces, d’indiquer ceux de ces auteurs que le professeur a expliqués au courant de l’année scolaire. Ce seront les seuls sur lesquels on les interrogera. Et, avec cela, si l’on ne s’amuse pas à leur proposer des versions hérissées de difficultés, de même qu’en français, si nous ne leur donnons point à traiter des sujets d’« histoire littéraire, » — les seuls qui s’apprennent un peu dans les Manuels, — mais un texte à expliquer, vingt-cinq lignes de Pascal ou de La Bruyère ; une maxime de La Rochefoucauld, une pensée de Vauvenargues, un paradoxe de Chamfort ou de Rivarol à discuter ; une lettre, un Discours, un lieu commun de critique ou de morale à « développer, » l’examen leur sera rendu infiniment plus facile ; la préparation en deviendra forcément intéressante autant que profitable :