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n’ont pas amené devant leurs chefs respectifs moins de 22 000 individus (sur lesquels, hâtons-nous de le dire, 7 seulement avaient à répondre de mort d’homme), et nous aurons donné l’idée de l’activité et de la vigilance dont notre policeman ne doit jamais se départir.

Près de ce corps d’élite, les 220 hommes de la brigade des Pompes, parfaitement exercés et répartis en 16 compagnies, veillent, de leur côté, à la sécurité de la ville. La rapidité des secours contre le feu, telle qu’elle est comprise en Amérique, est depuis longtemps citée comme un modèle. Les 10 ou 15 hommes formant le poste fument, jouent aux cartes ou lisent leurs journaux autour des appareils. Le timbre d’alarme retentit. En moins de deux minutes, les chevaux sont dans leurs traits, les pompiers à leurs places, et la première voiture part au galop dans un roulement de tonnerre. Les incendies sont fréquens : nombreux aussi sont les actes de courage. De 1895 à 1897, nous ne relevons pas moins de 43 noms sur la liste de ceux qui ont payé leur zèle, soit d’un membre, soit même de la vie.

Un tel service coûte cher, il est vrai : le chef de la brigade a 11 000 francs de solde ; les quatre sous-chefs près de 7 000 francs, les mécaniciens un peu moins de 6 000 ; les pompiers, porte-lances, etc., de 4 000 à 5 000. Encore le rapporteur spécial pour ce chapitre trouve-t-il les crédits insuffisans et le personnel trop restreint, prenant, pour points de comparaison, San-Francisco qui, avec une population à peine plus élevée, possède 32 compagnies et un effectif de 400 hommes ; Buffalo et la Nouvelle-Orléans qui, avec un nombre d’habitans sensiblement égal, comptent l’une 42 et l’autre 36 compagnies ; Saint-Paul, enfin, qui n’ayant que 133 000 habitans, entretient cependant 31 postes de pompes, comprenant ensemble 200 hommes.

C’est que le feu qui, comme toutes choses, semble aller plus vite en Amérique qu’ailleurs, le feu est la grande terreur de ces métropoles. D’immenses dépôts de marchandises, des bâtimens de huit à dix étages, parfois douze ou quinze, les quartiers pauvres confinant aux quartiers riches, de trop nombreuses constructions en bois ou on brique légère, une multitude de cours et d’enclos séparés par des palissades on planches, presque partout le gaz et l’électricité employés en plein jour, une foule de machines au cœur des cités, l’incurie des gens de couleur. Chinois ou nègres, n’est-ce pas la menace du fléau partout et à toute heure ?... Sans