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Nous n’avons pas parlé des richesses minérales que le Sahara peut contenir, sauf le sel, qui assurera un énorme trafic. Il est très peu vraisemblable que cette immensité, qui, dans le plateau du Tassili, longeant le Hoggar, et dans l’Aïr, contient de vastes zones de terrains primitifs, ne renferme pas de richesses minières. On sait que déjà le Sud algérien et tunisien a révélé d’énormes gisemens de phosphate et que la même région paraît très riche en minerais de calamine, aujourd’hui infiniment recherchés. Une opinion assez accréditée parmi les savans, c’est qu’il y a de grandes chances de trouver dans le Sahara des dépôts de nitrates. Il a été fait de très instructives études qui, naturellement, ne peuvent être encore qu’hypothétiques, sur les ressources minières sahariennes ? M. A. Souleyre, notamment, a beaucoup éclairé cette matière<ref> Voir ses articles dans la Revue Scientifique, intitulés : les Nitrates de l’Afrique du Nord, 2e semestre de 1893, et Origine et distribution des gîtes de métalloïdes ; Ressources minières du Sahara, n° du 4 mars 1899. /ref>. D’après des observations aussi exactes qu’ingénieuses, il existe une loi de concentration des matières minérales sur des bandes parallèles à l’équateur : c’est ainsi que les phosphates d’Algérie et de Tunisie correspondent à ceux de la Floride et des Carolines, et que l’on pense que dans le massif volcanique du Hoggar, sur le tracé du Transsaharien, à 1 500 kilomètres de la côte d’Algérie, il doit se trouver des dépôts de nitrate analogues à ceux du désert d’Atacama dans l’Amérique du Sud. S’il en était ainsi, les 1 500 kilomètres à franchir, au tarif de 2 centimes, représenteraient seulement 30 francs la tonne sur une marchandise qui vaut 170 francs dans les ports algériens ; à supposer que l’on n’en transportât que 200 000 à 300 000 tonnes par an, ce qui représenterait moins du quart ou du tiers des transports de nitrate au Chili et n’égalerait pas les exportations qui se font actuellement de phosphates d’Algérie et de Tunisie, ce serait un trafic de 4 000 à 6 000 francs par kilomètre.

Il ne s’agit là, sans doute, que de « possibilités, » comme disent les Anglais ; mais, quand ces magnifiques « possibilités » se joignent à de satisfaisantes certitudes, comme celles que nous avons décrites plus haut, c’est assez pour déterminer un grand travail public qui ne doit, d’ailleurs, coûter qu’une somme modique, 230 à 250 millions de francs. Même sans aucun appoint de nitrate et de trouvailles dans le Sahara, autres que le sel, il apparaît comme infiniment probable que le Transsaharien aurait,