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touchent au commerce autant qu’à l’industrie. Les voituriers et les bateliers qui, jusqu’à l’ouverture du chemin de fer. avaient le monopole des transports entre Péking et la province, sans former une association régulière, se réunissent dans des auberges, les uns près de Tshien men, les autres hors de Tong pien men[1], ils établissent des règles dont on s’écarte peu pour les prix à demander, les charges à admettre par bête ou par véhicule ; il en est de même à Thong tcheou pour les bateliers du Pei ho. Les barbiers de Péking n’ont pas non plus une corporation, mais ils forment une société, qui se réunit chaque année pour un sacrifice et un banquet. Les porteurs de chaise ne sont pas syndiqués à Péking ; à Thien tsin, sur la concession française, ils ont au contraire une association qui maintient les prix avec un soin jaloux et ne permet pas qu’aucun membre soit employé hors de son tour ; les traîneurs de zinrikcha à Chang hai, les maçons à Ning po, sans être constitués régulièrement, ont, l’an dernier, révélé leur bonne entente par des troubles. Chaque ville a ainsi ses corporations, ses associations, qui ne sont pas semblables à celles de la ville voisine.

Certains marchands, faisant un commerce régulier, n’ont pas formé d’association, ainsi, à Péking, les marchands de volailles, de poteries, de porcelaines ; au contraire, si les paysans, qui viennent vendre leurs légumes, trafiquent isolément du mieux qu’ils peuvent, lorsqu’ils portent leurs fruits au marché, ils acceptent une organisation dont on a oublié l’origine : chaque année, à l’apparition de chaque sorte de fruits, le king ki du marché, d’accord avec les marchands, en fixe pour toute la saison le prix minimum ; c’est aussi le king ki qui fait la police du marché ; la charge de king ki est la propriété de celui qui l’exerce, il l’a achetée de son prédécesseur et il la vendra à son successeur par contrat privé ; c’est une situation de fait que personne ne conteste ; au marché aux azeroles, la charge est héréditaire. Parfois le monopole de la corporation se complique d’une question de provincialisme ; on sait que le Chinois tient pour un étranger tout homme qui est né dans un autre district, à plus forte raison dans une autre province ; ceux, au contraire, qui sont de même origine se soutiennent toujours ; il est ainsi arrivé que certains commerces ont été monopolisés par les gens d’une province ; la plupart des banquiers

  1. Petite porte du nord-est de la ville chinoise.