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application stricte du droit d’accroissement, rétablissement du scrutin de liste, vote du vœu Pochon contre la liberté de l’enseignement, vote formel contre l’institution d’une fête nationale de Jeanne d’Arc : tels sont les derniers ordres. Conseillers généraux et municipaux feront bien de s’en inspirer, dans la mesure de leurs attributions. Conformez-y docilement vos votes, vous serez le député idéal ; reprenez ces idées, à titre de vœux, dans les assemblées départementales, vous serez le conseiller général idéal; et lorsqu’on est maire, on obtient pour sa « vaillante conduite républicaine » les « fraternelles félicitations du Conseil de l’ordre, » si l’on parvient, comme le fit, en mai 1897, un humble maire de Seine-et-Marne, à rendre la vie impossible au desservant et à « débarrasser sa commune de toutes robes noires[1]. » « Vous avez barre sur les hommes qui composent les conseils municipaux, disait, au convent de 1893, M. Thulié, conseiller municipal de Paris, vous pouvez les obliger à laïciser les hôpitaux comme on fait à Paris[2]. »

Et, par une amusante ironie, quelques exigences que professent en général les mandataires élus en ce qui concerne l’obéissance passive des fonctionnaires, ce sont, en l’espèce, des fonctionnaires qui, bien souvent, signifient ces ordres aux « représentai du peuple : » c’est un receveur des finances qui commande à la Chambre, en 1898, de voter le projet Pochon[3] ; c’est un inspecteur primaire qui commande à la Chambre, en 1896, de supprimer des programmes les devoirs envers Dieu[4]. Plus ces fonctionnaires oseront, plus ils seront sacrés intangibles par le Grand Orient : il y a un comité spécial chargé de les protéger[5] ; courent-ils quelque péril, le Grand Orient menace le député, le député menace le ministère, et jamais ministre, encore, ne s’est permis de rendre au Grand Orient menace pour menace. Oserait-on même, dans les ministères, faire faire antichambre aux membres du Conseil de l’ordre? C’est une question que posait assez impérieusement, au convent de 1893, l’un des orateurs, et il menaçait les ministres qui, par une telle désinvolture, se rendraient indignes du « cordon maçonnique[6]. » Lorsque se

  1. C. R. G. O., mars-mai 1897, p. 13-14.
  2. B. G. O. août-sept. 1893, p. 587.
  3. C. R. G. O., 19-24 sept. 1898, p. 300.
  4. C. R. G. O., 22-27 sept. 1896, p. 197.
  5. C. B. G. O., 20-25 sept. 1897, p. 202.
  6. B. G. O., août-sept. 1893, p. 342.