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refoulée au sud, dans les régions du Haut Nil. Elle y vit encore et n’a reparu dans le Delta qu’en ces dernières années. Los missionnaires anglais parurent en Égypte dès 1818 et, depuis, n’ont jamais ni renoncé à agir, ni réussi. Sur les musulmans, ni la « haute » ni la « large » Eglise n’avaient d’action. Non seulement les Bibles ne remplaçaient pas le Coran, mais les premiers contacts, que les œuvres de miséricorde et d’enseignement auraient pu établir entre cette population et ses futurs apôtres, étaient déjà pris par d’autres. C’étaient les Français qui aidaient Mehemet-Ali à transformer l’Égypte. C’était notre langue qui devenait en usage, nos idées qui se répandaient, notre race qui possédait le prestige. C’étaient nos missionnaires et nos religieuses qui avaient créé les écoles, les hôpitaux, les orphelinats. Dans tout le Delta où elles se développaient, nulles œuvres ne pouvaient attirer les indigènes comme celles qui s’élevaient par la générosité du peuple alors le plus éclatant, et avec la faveur de l’autorité musulmane. Les missionnaires anglais comprirent que, s’ils avaient une chance de trouver des adhérens, ce serait parmi les Coptes, éloignés de l’Eglise romaine par leur schisme, comme de l’Islam par leur foi chrétienne et par le souvenir de leur antique indépendance. Mais les missions britanniques demeuraient fixées dans le Delta, la masse des Coptes habitait le Haut Nil, les rapports se bornaient à des négociations des Anglais avec le patriarche copte, à de courts voyages des missionnaires dans la Haute-Égypte. Rien ne se fit que des projets, avant l’arrivée des Américains. Ceux qui débarquèrent en 1854 étaient quelques hommes et quelques femmes envoyés par l’Eglise presbytérienne unie. Ils portaient presque le même nom que les missionnaires de l’Arménie, apparaissaient au même moment, et, tout en se déclarant distincts, sans définir d’ailleurs ce qui les séparait, ils allaient employer les mêmes méthodes. Installés d’abord à Alexandrie et au Caire, quand ils virent que leurs efforts étaient là stériles, ils remontèrent le Nil pour vivre auprès des populations coptes.

Dès 1865, Siout devenait Je centre de l’œuvre, et de ce jour elle commençait à donner des fruits. Le colporteur de Bible, le maître d’école, le missionnaire se succèdent, l’un préparant la venue de l’autre, dans des agglomérations que la pauvreté et la nonchalance du clergé copte laissaient dépourvues de toute science divine et humaine. Des dames missionnaires apportent aux femmes, les êtres les plus oubliés sur cette terre d’abandon, l’inestimable