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d’école et des prédicans, voulurent faire des docteurs. Une école de médecine exigerait moins de professeurs qu’un collège et l’emporterait par le prestige, autant que l’enseignement supérieur l’emporte sur l’enseignement secondaire. Les Américains encore eurent le mérite de l’idée et de l’exécution. En 1875, cette école fut fondée à Beyrouth et prit le nom d’Université. Elle eut aussitôt plus de cent élèves, et cette ingénieuse avance à l’orgueil et à l’intérêt des Syriens assura aux protestans une primauté. Il ne restait au catholicisme qu’à imiter ses rivaux. Il montra d’ailleurs une promptitude égale dans la volonté et dans les actes. En 1885, s’ouvrait à Beyrouth une école de médecine, dotée de professeurs plus nombreux, de services plus complets, et toute française. Les jésuites avaient fondé et dirigeaient la nouvelle Université ; l’hôpital tenu par les sœurs de charité servait de clinique ; le gouvernement français avait, outre de faibles secours, fourni une aide efficace, en accordant à cette Université des examinateurs nommés par lui, et aux diplômes décernés par eux validité même en France. La réputation des médecins formés par l’Université catholique l’a vite emporté sur celle des médecins qui sortaient de l’Université protestante. La première grandit et compte plus de cent élèves, la seconde décline et n’en a que quarante.

A l’heure présente, le prestige de la haute science est reconquis par les catholiques. Ils continuent à donner seuls l’enseignement secondaire. Mais les protestans continuent à disputer l’avantage dans l’instruction populaire. Les catholiques ont, là encore, mis à profit la leçon, utilisé le concours des prêtres maronites, des sœurs indigènes, et multiplié ainsi les écoles et l’apostolat. Mais, pour instruire solidement ceux qui devront enseigner, les protestans n’épargnent ni le temps ni la dépense. L’un et l’autre sont, faute de ressources, plus parcimonieusement mesurés dans les établissemens catholiques où se forment les prêtres et les maîtres indigènes. Ceux-ci passent pour inégaux de science religieuse et d’aptitude pédagogique à leurs émules. Où il faut choisir entre eux, cette renommée de savoir humain attire aux protestans nombre d’élèves qui vont non aux doctrines les plus sûres, mais au maître le plus habile, et, parmi ces élèves, elle en séduit certains au point qu’ils suivent ensuite ce maître de l’école au temple. Voilà pourquoi, dans le pays d’Asie où la population catholique est la plus dense et notre prestige le