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quitté. C’est évidemment du souvenir de ces cérémonies symboliques que s’est inspiré le dogme mithriaque[1].


V

J’en viens à la manifestation la plus saisissante et la plus connue des mystères de Mithra, le sacrifice du taureau.

Dans toutes les religions antiques, aryennes ou sémitiques, le taureau représente le Dieu solaire qui déchaîne l’orage. C’est lui qui de ses traits d’or féconde les vaches qui sont les nuées ; il fait descendre sur les terres desséchées les pluies bienfaisantes, et au fort de la tempête, il remplit l’air de ses mugissemens. L’Indra védique, l’Horus d’Egypte, le Mardouk de Babylone, comme le Jupiter et le Bacchus helléniques, sont tous également figurés sous la forme du taureau, ou le front armé de cornes.

Le taureau du sacrifice mithriaque emprunte sa signification multiple aux deux traditions, persane et chaldéenne.

Il est d’abord le taureau astronomique et représente l’exaltation du soleil dans cette constellation, à l’équinoxe du printemps. Voilà pourquoi le plus ancien des types mithriaques montre Mithra debout sur le taureau, comme dans le monument de la villa Altieri, et comme sont figurés les dieux solaires sur les cônes et cylindres babyloniens. Car alors, comme dit Macrobe, le taureau porte le soleil. « Il est le dieu jeune et triomphant qui ouvre l’année de ses cornes d’or, » et qui va renouveler la fécondité de la terre. A sa droite et à sa gauche se tiennent les dadophores, deux jeunes hommes, dont l’un porte un flambeau levé, l’autre une torche abaissée vers le sol. Ils représentent les génies du Matin et du Soir, le Printemps et l’Hiver, la Vie et la Mort. Entre les pattes du taureau se glisse un scorpion, qui pince et ronge les parties génitales de la bête ; c’est le signe de l’équinoxe d’automne, qui tarit la sève de l’année et épuise sa force productrice. Pour accentuer la signification astronomique de l’ensemble, sur la plupart des monumens, au-dessus de Mithra tauroctone, se développe la série des signes zodiacaux. Mais ce taureau est en même temps le taureau persan. Il est le taureau primordial, « créé unique par Ormuzd, » ou plutôt, comme

  1. Sur la fortune de ces symboles, on peut consulter Platon, dans le Timée et le liv. X de la République. Cf. aussi Proclus : Commentaire au Xe livre de la République (Mythe d’Er l’Arménien).