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pour les Autrichiens. Le parti libéral lui-même oublie les sympathies que lui inspirait l’Italie. La Diète de Francfort prendra des résolutions conformes au sentiment public ; elle déclarera que, si les possessions autrichiennes en Italie étaient menacées par la France, les gouvernemens allemands y verraient un danger pour la Confédération germanique. »

L’Autriche ne négligeait aucun effort pour entraîner les cours du Midi, dont plusieurs, disait-on, étaient enchaînées à sa politique par des traités secrets. On prévoyait que, si la guerre devait éclater, le passage du Tessin serait le moment décisif que le cabinet de Vienne choisirait pour tenter à Francfort un suprême effort, et réclamer de la Diète l’application de l’article 47 du pacte fédéral, imposant à la Confédération l’obligation de concourir à la défense des possessions non germaniques de l’un des confédérés engagé dans une guerre avec une puissance étrangère.

On disait même que, pour soulever plus sûrement les populations et forcer la main aux gouvernemens, le comte Buol se proposait de faire traverser aux troupes autrichiennes le territoire de la Confédération germanique. Déjà on annonçait le transport éventuel, par les chemins de fer de la Bohême, de 40 000 hommes, qui, dirigés sur le Vorarlberg, aux frontières du Tyrol, passeraient par Dresde et Leipzig. Le contingent saxon, — 18 000 hommes, — était sous les armes, prêt sans doute à opérer sa jonction avec l’armée impériale. Il était question également de pousser une pointe avec 400 000 Autrichiens sur le territoire français, par Germersheim, en traversant et en soulevant la Bavière.

Le cabinet des Tuileries s’alarmait de ces bruits. On se demandait à Paris si les États confédérés, à moins d’avouer l’existence de traités incompatibles avec leur neutralité, pouvaient laisser franchir leurs territoires à des troupes autrichiennes. Heureusement pour nous, la Prusse, jalouse de son influence sur les cours du Midi, s’appliquait à contrecarrer sous main la diplomatie autrichienne, avec l’arrière-pensée de profiter de ses embarras pour s’assurer la prépondérance à Francfort. « Si l’Autriche, disait M. de Schleinitz au marquis de Moustier, persistait à vouloir entraîner à sa suite les États allemands, il ne nous resterait d’autre alternative que de faire sauter la Diète. »

La Prusse ne se souciait pas de s’engager prématurément, elle se réservait pour tomber sur la France vaincue ou pour offrir sa