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le troisième exemple certain d’une sécrétion interne. On ne connaît pas intégralement sa composition, mais on a réussi à en isoler l’un des élémens essentiels, l’iodothyrine. Pour la troisième fois, nous rencontrons ici une espèce de sécrétion en vertu de laquelle un organe déterminé se trouve associé et solidarisé avec tous les autres.

Cette notion a été étendue par Claude Bernard à toutes les glandes closes, et, par suite d’une induction plus large encore dont la paternité remonte à Legallois, en1801, à tous les organes, à tous les élémens vivans. L’extension résulte immédiatement du principe de la nutrition. Tout tissu vivant, tout élément anatomique puise et rejette incessamment des matériaux dans le milieu qui l’entoure, milieu qui, chez les animaux supérieurs, se continue et se confond avec le sang lui-même. Parmi les substances empruntées ainsi au dehors, il y en a de communes ; telles, l’eau, l’oxygène ; mais il y en aussi qui sont plus ou moins spéciales à chaque particule vivante et qui composent en quelque sorte son régime particulier.

De même, il y a parmi les substances rejetées au dehors des matières banales, que toutes les cellules vivantes produisent indifféremment et éliminent comme des déchets : tels l’acide carbonique et l’eau. Mais on ne peut douter qu’il n’y en ait de plus ou moins spéciales à chaque catégorie de cellules, et témoignant de son activité propre ; l’on pourra, par analogie, appeler sécrétion interne cette espèce de substance fabriquée par la cellule et évacuée dans le sang, comme tout à l’heure le sucre quand il s’agissait du foie.

Cette manière d’être se traduira évidemment dans la composition du sang qui revient des organes. En supposant qu’ils reçoivent tous, par la voie artérielle, un sang identique, chacun renverra nécessairement un sang veineux différent. L’idée de l’unité du sang artériel, opposée à la diversité absolue des sangs veineux, est une de celles sur lesquelles Claude Bernard aimait à revenir : il l’a développée avec ampleur dans son cours de 1875.

Le sang veineux qui revient des organes au cœur droit est donc un mélange hétérogène qui conserve les traces matérielles de l’activité spéciale de toutes les catégories d’élémens vivans. Le poumon qui le reçoit ensuite lui fait subir des transformations inconnues ou dont nous ne connaissons tout au moins que la plus grossière, l’aération ; il le confie ensuite aux voies de transport,