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d’octobre. « Le jeudi 22, disait-il, le Roi vint d’une traite de Versailles à Fontainebleau, ayant trois relais. Ce même jour fut celui de la consommation du mariage de Monseigneur le duc de Bourgogne. » La Gazette d’Amsterdam, dans sa correspondance de Paris, du 23 octobre 1699, donnait la même nouvelle. Des lecteurs du Mercure et de la Gazette qui formaient un public restreint, cette nouvelle passait dans le peuple, qui s’en réjouissait, comme il s’était réjoui quelques années auparavant de la naissance du jeune prince. On avait fait des chansons sur son mariage. On en fit une, assez gaillarde, sur la « besogne » à laquelle il venait de se livrer. Nous n’en citerons que le dernier couplet :


Content sera le Grand-Papa
Et de tout son cœur en rira
Quand il verra de la besogne
De Monsieur le duc de Bourgogne.


S’il faut en croire Mme Dunoyer, cette chanson aurait eu pour auteur la duchesse de Bourbon elle-même, qui, héritière de l’esprit caustique de sa mère Mme de Montespan, tournait en effet assez volontiers en chansons railleuses tout ce qui se passait à la Cour. « On ne chante pas autre chose à présent, ajoute Mme Dunoyer. M. d’Argenson, notre lieutenant de police, a voulu le défendre, mais il n’a pas pu en venir à bout[1]. »

Le Grand-Papa avait plus d’une manière de témoigner sa satisfaction. Il offrit au duc de Bourgogne d’augmenter les douze mille écus par an qui lui étaient alloués pour ses menus plaisirs, mais le duc de Bourgogne « dit au Roi qu’il en avoit assez, et que si, dans la suite, il en avoit besoin, il prendroit la liberté de le lui dire[2]. » Le duc de Beauvillier cessant toute fonction auprès de lui, le Roi nommait, pour l’accompagner partout où il irait, trois nouveaux gentilshommes. C’étaient le marquis d’O, le comte de Chiverny et le marquis de Saumery. Ce nouveau service ne leur assurait ni « nom d’emploi, ni brevet, ni appointemens, mais de beaux propos en les y mettant, et l’agrément d’être, sans demander, de tous les voyages de Marly. » — « Et cela seul, ajoute Saint-Simon, tournoit les têtes[3]. »

  1. Lettres historiques et galantes, t. I, p. 308.
  2. Dangeau, t. VII, p. 167.
  3. Saint-Simon, édit. Boislisle, t. VI, p. 368.