futures, une importance plus grande et toute l’efficacité dont il est capable ? Pourquoi reléguer dans un coin du drame, pourquoi ne pas élargir, aux dépens des sottes cavatines et des inévitables da capo, ce genre de développement musical auquel on doit les plus grands effets obtenus jusqu’ici ? Le récitatif obligé peut arriver, par des nuances infinies, et que l’aria ne connaît pas, jusqu’aux dernières limites du sentiment. Il surprend les plus faibles, les plus imperceptibles mouvemens du cœur ; sans en violer le secret, il le dévoile ; il révèle non pas l’élément qui domine la passion, mais chacun des élémens qui la composent. Il analyse la lutte, la crise morale, dont Varia ne peut, sans de grandes difficultés, nous donner que le résultat. Au lieu de reporter, comme l’aria, l’intérêt musical sur le mécanisme de l’exécution, il le concentre tout entier dans l’effet à produire sur notre âme. »
À chacun de ces traits, ne reconnaissez-vous pas encore un autre aspect, et non l’un des moins considérables, du génie wagnérien ? Substituer à l’air, au « morceau » le récitatif, je ne dirai pas que Wagner n’a pas fait autre chose ; mais, dans la technique ou dans la pratique de son art, c’est une des plus grandes choses, et des plus originales, qu’il ait faites. Non pas un récitatif insignifiant, superficiel et courant à fleur de lèvres ; mais un récitatif plus profond, plus expressif, et par conséquent directement issu du « récitatif obligé. » Obligé, lui aussi, au rythme, à la mesure, à la recherche de la vérité et à la justesse de la déclamation ; obligé au sérieux, à la dignité et à la tenue, au respect d’un orchestre, qui non seulement l’accompagne, mais le commente, le fortifie et le complète. Obligé et cependant libre ; plus libre du moins que l’air classique, plus souple, plus maniable, plus fin aussi et plus pénétrant. Ce récitatif, qui n’était rien ou presque rien avant Wagner, qui n’avait jusque-là jeté que des éclats et comme des éclairs de beauté, Wagner l’a repris, recréé à son usage ; de ce qui n’était que l’exception, il a fait la démarche presque constante de son style musical et de son discours lyrique. Et Mazzini sans doute n’a pas vu jusqu’où ce nouveau chemin pouvait conduire ; mais il a vu le chemin et conseillé de le prendre.
Infatigable conseiller, devin infaillible, il écrivait encore : « Tout homme, sur le grand théâtre du monde, est une pensée, un sentiment. Sur un théâtre d’opéra, pourquoi n’est-il plus qu’une voix ? Tout homme, — et plus manifestement encore l’homme